Dans un avis en date du 20 septembre 2024, le Groupe de travail des Nations Unies (GTDA) sur la détention arbitraire a reconnu le caractère arbitraire de la privation de liberté d’Abdurrahman Abduljalil Mohamed AL FARJANI, jeune libyen arrêté le 27 décembre 2014 à son domicile dans le quartier d'Al Lithi par une milice armée affiliée à Khalifa Haftar.
Alkarama avait soumis son cas dans une communication en date du 24 avril 2024 et avait appelé les experts indépendants à exhorter les autorités libyennes à le libérer.
Le Groupe de travail a qualifié dans son Avis sa détention, qui dure depuis près de dix ans, comme arbitraire et en violation flagrante de ses droits fondamentaux et appelé les autorités libyennes à le libérer.
Les faits
Né en 1997, Al-Farjani vivait à Benghazi lorsqu'il a été arrêté à son domicile, le 27 décembre 2014, par des membres de la Brigade Tariq bin Ziyad, une milice armée contrôlé par Khalifa Haftar. Agé de 17 ans à l’époque de son arrestation, il n’a jamais été inculpé. Aucune charge n'a été portée contre lui et il n'a jamais été informé des raisons de son arrestation. Sa famille, qui s'est opposée au régime de Haftar, a également subi des pressions et des menaces.
Suite à son arrestation, il a été conduit dans un centre de détention où il a subi des tortures physiques et psychologiques dans le but d’obtenir des aveux. Après plusieurs semaines d'interrogatoires violents, il a été transféré à la prison d'Al-Koufiya, sous le contrôle effectif des milices pro-Haftar, où il est encore actuellement détenu. Il n’a jamais été présenté devant un tribunal, ni formellement inculpé.
Une privation de liberté arbitraire selon les experts de l’ONU
Dans son Avis No. 42/2024 rendu le 20 septembre 2024, le Groupe de travail a conclu que la détention d’Al-Farjani viole plusieurs dispositions du droit international, notamment les articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantissent à tout individu le droit à la liberté, à un procès équitable et à ne pas être soumis à une détention arbitraire.
Le Groupe de travail a également appelé le Gouvernement libyen à libérer immédiatement Al Farjani et à lui accorder une indemnisation pour les préjudices subis. Les experts ont également exhorté les autorités libyennes à initier une enquête indépendante sur les circonstances de son arrestation et les conditions de sa détention et de sanctionner les auteurs de ces violations conformément à leurs obligations conventionnelles.
Le rôle des milices dans les violations des droits de l’homme
Le cas d’Al Farjani est une illustration tragique de la réalité de nombreux détenus en Libye, où les arrestations arbitraires et les détentions prolongées sans procès sont systématiques, particulièrement dans les zones placées sous le contrôle des milices.
C’est la raison pour laquelle Alkarama, dans plusieurs précédents soumis au Groupe de travail, avait souligné la nécessité de placer les milices sous le contrôle effectif de l’État partie.
Par cette décision Alkarama réitère ses préoccupations et rappelle l’urgence d’une réforme en profondeur du système de justice en Libye, pour garantir le respect des droits fondamentaux des détenus et mettre fin à l’impunité des milices qui contrôlent de facto une grande partie des centres de détention dans le pays.