EAU : 15 militants arrêtés en l'espace de 72 heures

Au cours des derniers jours, les Emirats arabes unis ont intensifié leurs efforts pour faire taire des opposants politiques et des militants des droits de l'homme. Au moins 15 militants ont été arrêtés dans les dernières 72 heures à Ras Al-Khaimah, Dubaï, Sharjah et Abou Dhabi par les services de sécurité émiratis au prétexte qu'ils représentaient une menace pour la sécurité intérieure.

Après la déportation du blogueur bidoune Ahmed Abdulkhaleq vers la Thaïlande lundi dernier - affaire que l'ONU a qualifié de « très inquiétante » - il apparaît clairement que les autorités mettent tout en œuvre pour réprimer tous ceux qui entendent exercer leur droit à la liberté d'expression et d'opinion. Depuis mars dernier, le nombre de militants arrêtés par les autorités s'élève à 28.


Le 15 juillet dernier, l'agence de presse officielle WAM annonçait que le Procureur général Said Kubaish avait ordonné l'arrestation d'un « groupe inféodé à des organisations et des initiatives étrangères » et accusé de fomenter un complot menaçant la « sécurité nationale » et la constitution des Emirats. Dans les trois jours qui ont suivi cette annonce, au moins quinze militants politiques et défenseurs des droits de l'homme ont été arrêtés par les services de sécurité émiratis à Ras Al-Khaimah, Dubai, Sharjah et Abou Dhabi. Parmi eux, figurent l'éminent défenseur des droits de l'homme Dr. Mohammed Al-Roken et le Dr. Mohammed Al-Mansoori, Directeur du Centre d'études et d'informations émirati. Le Dr Al-Roken était l'un des avocats à avoir défendu les membres d'Al-Islah détenus arbitrairement et le groupe connu sous le nom des « 5 des Emirats ».


Outre ces deux éminents défenseurs des droits de l'homme, les groupes locaux de défense des droits de l'homme rapportent que les personnes suivantes ont été arrêtées les 16, 17 et 18 juillet dernier :


Le 16 juillet :
- Abdulrahman Al-Hadidi, membre d'Al-Islah, arrêté à l'aéroport alors qu'il se préparait à partir avec sa famille pour faire le pèlerinage à la Mecque
- Khalifa Al-Nuaimi, étudiant de 24 ans et militant des droits de l'homme, arrêté chez lui. Les services de sécurité ont perquisitionné son domicile pendant cinq heures avant de l'emmener vers une destination inconnue
- Rachid Al-Shamsi, écrivain
- Khalid Al-Nuaimi, militant politique
- Abdulrahman Al-Nuaimi, fils de Khalid Al-Nuaimi. Libéré.
- Omran Al-Radhwan, membre d'Al-Islah
- Mohammed Al-Hosani
- Hussein Al-Najjar, membre d'Al-Islah


Le 17 juillet :
- Rachid Al-Roken, fils du Dr. Mohammed Al-Roken
- Abdullah Al-Hajiri, gendre du Dr. Mohammed Al-Roken
- Essa Al-Sari, membre d'Al-Islah


Le 18 juillet :
- Dr. Issa Khalifa Al-Suwaidi, ancien directeur de la zone d'éducation d'Abou Dhabi

Selon des militants des droits de l'homme émiratis, Abdulrahman Al-Hadidi, arrêté le 16 juillet, serait détenu par les services de sécurité à Abou Dhabi. Ils rapportent aussi qu'Abdulrahman Al-Nuaimi est le seul à avoir été libéré quelques heures après son arrestation. A ce jour, les autorités n'ont toujours pas reconnu la détention des 14 autres militants. Les associations de défense des droits de l'homme locales déclarent qu'il est fort probable qu'ils aient été placés en détention préventive pour des raisons de « sécurité nationale ». Ils pourraient être accusés de « s'opposer à la constitution et aux principes fondamentaux du gouvernement émirati ». La plupart des militants arrêtés sont affiliés au mouvement politique d'Al-Islah (Appel à la réforme), un groupe non-violent appelant à une réforme constitutionnelle aux Emirats. La vague de répression dirigée contre les militants de ce groupe s'est intensifiée depuis le 20 avril dernier avec l'arrestation du Président d'Al-Islah Sultan Al-Qasimi.


Alkarama est très préoccupée par les développements récents et l'intensification de la vague de répression dirigée contre les militants émiratis accusés de représenter « une menace pour la sécurité nationale ». Il est clair que les autorités utilisent un tel prétexte pour étouffer toute voix dissidente dans le pays. Arrestations et détentions arbitraires, menace de retrait de nationalité, déportations... le gouvernement a recours depuis plusieurs semaines à différents outils de répression pour tenter de faire taire les militants.


L'ONU a appelé hier les autorités émiraties à « protéger les défenseurs des droits de l'homme afin de s'assurer qu'ils puissent mener à bien leurs activités, après que plusieurs cas de harcèlements, d'arrestations arbitraires et d'expulsions ont été rapportés dans le pays. » Alkarama se joint à tous ceux qui demandent la libération des 14 militants détenus arbitrairement et de tous les autres arrêtés pour avoir exprimé leurs opinions. Nous rappelons que la détention arbitraire des 14 militants constitue une violation de l'article 32 de la Charte arabe des droits de l'homme à laquelle les Emirats sont partie qui garantit la liberté d'opinion et d'expression.