Yémen: le témoignage déchirant d'un ancien détenu yéménite dans une prison secrète émiratie située dans une installation pétrolière de Total

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Un ancien détenu yéménite des prisons secrètes émiraties au Yémen a révélé qu'il avait été soumis à des tortures psychologiques et physiques aux mains des enquêteurs émiratis, lors de sa détention dans une prison secrète du complexe pétrolier de Balhaf. Ce complexe est géré par la société française Total, dans la province yéménite de Shabwa.
L'ancien détenu Salem Al-Rubaizi a livré un témoignage terrifiant sur les tortures qu'il a subies dans une prison secrète de l'installation de Balhaf, occupée par les Émirats arabes unis. Il a été arrêté par "l'Élite Shabwani" soutenue par les Émirats arabes unis, le 10 juin 2019, et transféré dans de nombreux centres de détention, où il a été soumis à des chocs électriques et à de violents coups pour le forcer à raconter un récit inventé de toutes pièces pour le faire condamner pour communication avec un pays étranger, avant d'être libéré début avril 2021.
Alkarama était en contact avec la famille du détenu al-Rubaizi pendant sa détention. Depuis le début du conflit armé au Yémen, elle a suivi la détérioration de la situation des droits de l'homme dans le pays, compte tenu de la poursuite de la guerre, de l'absence d'état de droit et de la prévalence d'un climat d'impunité. Au cours des dernières années, Alkarama a soumis des dizaines de plaintes individuelles aux Procédures spéciales des droits de l'homme aux Nations Unies, comprenant des violations commises par les différentes parties au conflit dans le pays, y compris des cas de détention, de disparition forcée et de torture. Des rapports parallèles ont également été présentés lors de l'EPU, mettant en lumière la situation des droits de l'homme dans le pays.
Au début de l'année 2021, un rapport publié par le Comité des sanctions du Conseil de sécurité indiquait que toutes les parties au conflit au Yémen continuaient de commettre de graves violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, notamment des attaques aveugles contre des civils, des disparitions forcées et des actes de torture.
De nombreux rapports sur les droits de l'homme ont fait état de violations généralisées commises par les forces émiraties ou les formations armées locales qui leur sont affiliées dans de nombreuses régions du Yémen, dont certaines s'apparentent à des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, notamment la torture et les disparitions forcées dans des centres de détention secrets qui ne sont pas soumis aux autorités judiciaires. Les EAU avaient l'habitude de le nier, malgré les témoignages de nombreuses victimes survivantes de ces terribles prisons secrètes.
Récemment, trois organisations non gouvernementales ont confirmé qu'un site d'extraction de gaz dans la zone de Balhaf du gouvernorat de Shabwa, dans le sud du Yémen, dont une partie est utilisée par le groupe français Total, comprenait une prison secrète utilisée par des soldats émiratis en 2017 et 2018. Ce site contient une usine de liquéfaction et un terminal pour l'exportation de gaz naturel liquéfié.
Les organisations Arms Observatory, Smovas et Friends of the Earth ont déclaré dans le rapport : " Selon les sources et les témoignages disponibles, le site abrite depuis 2016 la milice des " Forces d'élite de Shabwa " sous la supervision des EAU et et ont ajouté que  " les témoignagent relataient des faits de  privation de soins, torture commises par les soldats émiratis ". De même : " Les personnes qui y sont emprisonnées sont généralement accusées d'appartenir à Al-Qaïda dans la péninsule arabique, " souvent sur la base " de soupçons infondés ou de vengeances personnelles. "
Dans une enquête publiée par le journal français " Le Monde ", le lieu d'arrestation se trouve sur une base militaire que les Emiratis ont installée à la mi-2017 sur une partie du champ gazier, contrôlé à la demande du gouvernement yéménite.

Alkarama souligne, une fois de plus que selon le droit international, il y a une responsabilité pénale pour ces violations, et qu'elles peuvent donner lieu à des poursuites contre les chefs de milices qui ont été impliqués dans des crimes portant atteinte au droit à la vie, à l'intégrité physique et morale, à la liberté, ou à toute pratique portant atteinte à la dignité humaine.