TUNISIE : Le cas du magistrat Bechir AKREMI, soumis au Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire

Bechir AKREMI

Le 31 janvier 2024, l’Association des Victimes de la Torture en Tunisie (AVTT) et Alkarama ont soumis au Groupe de travail de l’ONU sur les détentions arbitraires (GTDA), la situation de M. Bechir AKREMI, magistrat, arbitrairement arrêté et maintenu en détention depuis près d’une année aujourd’hui. 

Arrestation et maintien en détention 

M. Bechir AKREMI a été arrêté le 12 février 2023 à 17 heures par une vingtaine de policiers appartenant à la brigade anti-terroriste en tenue civile à son domicile sans mandat de justice et sans qu’il ne lui soit notifié les motifs de son arrestation. Inculpé de plusieurs charges tombant principalement sous le coup de la très controversée loi antiterroriste, il a été placé en détention en violation totale de la loi et de ses droits fondamentaux. 

Son cas avait été initialement soumis par Alkarama au Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’indépendance des juges et des avocats dans une communication en date du 7 février 2023. Par la suite, compte tenu de ses conditions de détention, Alkarama s’était de nouveau adressée au Rapporteur spécial sur la torture dans une communication en date du 12 avril 2023

Récemment, la détention de M. Bechir AKREMI a de nouveau été prolongée de quatre mois sans motif légal et en l'absence de toute nécessité sur décision du juge d'instruction du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme en date du 05 janvier 2024. 

Alkarama, coinjointement avec l’AVTT, a donc décidé de soumettre la situation du magistrat  injustement emprisonné pour avoir refusé de céder aux menaces et aux pressions politiques, aux experts du groupe de travail onusien dans une communication en date 31 janvier 2024, sollicitant sa libération immédiate après que soit reconnu le caractère arbitraire de sa détention. 

Alkarama s’adresse au Groupe de travail 

Dans sa communication, Alkarama et l’AVTT ont souligné que la privation de liberté de M. Bechir AKREMI, sur le fondement de la loi antiterroriste qui ne répond pas aux exigences du principe de légalité, rend arbitraire sa détention. Plusieurs experts des Nations Unies avaient, en effet, soulevé les incompatibilités de ladite loi avec les exigences du droit international et appelé la Tunisie à réformer sa législation. 

Les autorités persistent cependant à recourir à cette loi pour tenter de justifier des arrestations et privations de liberté arbitraires de personnalités politiques, d’avocats ou de magistrats en dépit du caractère pacifique de leurs activités et en l’absence même de tout élément matériel. 

M. Bechir AKREMI a été placé en détention en violation totale de ses droits à un procès équitable et sur la base de faits pour lesquels il avait déjà fait l’objet de poursuites ou d’enquêtes administratives toutes finalement conclues par des  décisions définitives de classement ou  de non-lieu. 

Alkarama et l’AVTT ont réitéré leurs préoccupations quant au manque d’indépendance du pouvoir judiciaire sérieusement compromise par les décisions unilatérales de l’actuel président qui s’arroge le contrôle total de la justice. Aujourd’hui, M. Bechir AKREMI se trouve confronté à un système judiciaire placé sous le contrôle total de l’exécutif et ne dispose donc d’aucun recours juridique efficace qui puisse lui permettre de faire prévaloir ses droits. 

Pour ces raisons, Alkarama et l’AVTT ont appelé le GTDA à reconnaître le caractère arbitraire de la privation de liberté de M. Bechir AKREMI et d’enjoindre aux autorités tunisiennes de cesser d’exercer persécutions et représailles contre un magistrat intègre et le libérer immédiatement.