Le 9 juin 2010 le Conseil des droits de l'homme adopte le rapport du Groupe de travail sur l’Examen périodique universel (EPU) relatif au Qatar. L’examen de la situation des droits de l'homme dans ce pays s’est fait lors de la septième session le 8 février 2010. Les observations des représentants des Etats présents lors de cette session et leurs recommandations sont consignées dans ce document. Les prises de positions et les engagements de l'Etat examiné en matière de protection des droits humains s'y reflètent également.
Alkarama avait dans le cadre de la contribution des ONG au processus d'Examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme présenté un rapport synthétique dans lequel elle abordait la situation des droits humains dans le pays. Elle a également proposé des recommandations qui reflètent ses principales préoccupations. Les représentants des Etats présents à l'examen n'ont pas exprimé les mêmes inquiétudes, notamment celles en relation avec des dispositions figurant dans de nouvelles lois promulguées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. La loi n° 17 de 2002 sur la « protection de la société », prévoit notamment que le ministre de l'intérieur peut décider la détention d'un prévenu s'il existe des présomptions contre lui en matière par exemple de sécurité de l'Etat, une définition qui permet de criminaliser tout opposant politique ou toute personne exprimant des opinions politiques considérées comme extrémistes. Cette loi dispose aussi que pour des crimes liés à la sûreté de l'État un prévenu peut être détenu jusqu'à deux ans avant d'être présenté devant un juge.
La loi antiterroriste de 2004 confirme ces mesures. De plus, aucun recours devant un tribunal n'est possible lorsque les décisions sont prises en application de ces deux lois qui légalisent de facto la détention arbitraire et au secret et ouvrent la porte à toutes sortes d'abus. Les personnes détenues en vertu de ces lois d'exception ne peuvent contester leur détention et n'ont pas accès à un avocat. Notre organisation a soumis plusieurs cas de détention arbitraire aux organes de l'ONU ces dernières années.
Une autre question qui n'a pas été expressément abordée lors de l'Examen périodique universel concerne le code régissant la nationalité promulgué en 2005 (Loi No 38/2005). Des pouvoirs très étendus sont attribués à l’émir par cette loi. L’article 11 l’autorise notamment à déchoir tout citoyen de sa nationalité dans certains cas, par exemple si celui-ci est engagé dans une institution ou une organisation considérée comme portant préjudice à l’organisation sociale, économique ou politique du pays.
Les personnes naturalisées jouissent de moins de protection encore puisque la nationalité qatarie peut leur être retirée à tout moment sur simple proposition du ministre de l’Intérieur s’il estime cette mesure conforme à l’intérêt général. L’inégalité des citoyens qataris d’origine et naturalisés est instituée par la loi, puisque ces derniers ne jouissent pas des mêmes droits; ils ne peuvent notamment être ni électeurs, ni éligibles.
Bien que l'article 36 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être soumis à la torture ou à un traitement dégradant. La torture est un délit punissable par la loi », le Code pénal de 2004 ne prévoit pas de disposition spécifique pour réprimer ce crime. Ce point n'a pas fait l’objet d’une attention particulière lors de la session du Conseil des droits de l'homme.
Différents pays ont cependant exprimé le souhait de voir adopter par le gouvernement qatari la définition de la torture figurant dans l'article 1 de la Convention contre la torture. D'autres recommandent de ratifier le Pacte International relatif aux droits civils et politiques.
Un grand nombre de recommandations ont été formulées dans le but d'introduire de nouvelles législations en rapport avec l'amélioration du statut et la représentation des femmes, des travailleurs immigrés, des personnes handicapées, des enfants.
Même des recommandations bienveillantes ou sans véritables conséquences formulées par certains pays ont été rejetées par le gouvernement confirmant une fois de plus que ce mécanisme d'examen de la situation des droits de l'homme montre des limites s'agissant d'un gouvernement que peu d'Etats sont enclins à critiquer.
Il faut toutefois relever que le gouvernement qatari s'est engagé à ratifier les Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques d'une part et aux droits économiques, sociaux et culturels d'autre part. Alkarama encourage les autorités à mettre en application cet engagement le plus rapidement possible.
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