Mauritanie: Acquittement et libération de détenus

Alkarama for Human Rights, 6 juin 2007

Alkarama for Human Rights a appris que le 5 juin 2007, le tribunal criminel de Nouakchott a acquitté 21 personnes qui avaient été arrêtées entre les mois d'avril et de juin 2005 et maintenues au secret pendant plusieurs semaines. Durant cette période les détenus ont été soumis à de graves actes de torture. Tandis que trois d'entre eux s'étaient enfui de prison, huit ont été libérés provisoirement le 27 juillet 2006 et les dix autres ont été maintenus en détention jusqu'à leur libération hier.

Alkarama for Human Rights avait saisi le groupe de travail sur la détention arbitraire le 12 juin 2006 pour une action urgente à propos des 18 personnes maintenues en détention arbitraire. Pour certains d'entre eux, Alkarama for Human Rights avait également saisi le rapporteur spécial sur la torture et envoyé un appel urgent au gouvernement mauritanien.

Alkarama for Human Rights avait également informé le Président du Conseil de l'Union européenne, le Président du Parlement européen et le Président de la commission européens de cette vague d'arrestations suivie de la détention arbitraire et de torture des concernés.

La vague d'arrestation entre avril et juin 2005 a touché des personnalités de l’opposition, présidents d’associations, professeurs, avocat, journaliste, tous de divers courants politiques, ainsi que de simples citoyens connus pour avoir exprimé des points de vue critiques à l’égard de la politique du gouvernement. Ces arrestations démontraient clairement la volonté des autorités de frapper sans distinction toute velléité d’opposition ou toute forme d’expression, et tous les observateurs s’accordaient alors à en reconnaître le caractère arbitraire.

Les personnes arrêtées sont les suivantes:

1-  Mohamed Sidiya Ould Ajdoud, né en 1959, professeur, arrêté le 25 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott

2-  Abdellah Ould Ahmed Ould Aminou, né en 1966,  professeur et imam, arrêté le 25 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

3-  Mohamed Mouhid Ould Mohamed Abdelhaq, né en 1976, enseignant et imam, arrêté le 25 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

4- Mohamed Ould Ahmed Ould Sid Ahmed, dit Al Chaer, né en 1968, poète et docteur en littérature, arrêté le 21 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

5- Ahmed Ould El Kowri, né en 1972, professeur, né en 1972, arrêté le 25 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

6- Mohamed Mahfoud Ould Ahmed, né en 1965, professeur, arrêté le 02 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

7-  Mohamed Mahmoud Ould Salek,  né en 1972, chauffeur, arrêté le 02 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

8-  Mohamed Al Amine Ould Hassen, né en 1984, étudiant universitaire, arrêté le 02 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

9-  Mohamed Hassen Ould Mohamed Abderrahmane, né en 1981, artiste graphique, arrêté le 02 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

10- Mohamed Ould Abdelwadoud, né en 1976, étudiant universitaire, arrêté le 03 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

11- Ahmed Ould Mohamed Abdellah, né en 1964, professeur, arrêté le 03 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

12- Mohamed Al Amine Ould Salek, né en 1971, professeur,  arrêté le 03 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

13-  Sidi Mohamed Ould Ahmed Vall, né en 1964, professeur et imam, arrêté le 06 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott

14-  Ahmed Ould Hine Ould Mouloud, né en 1978, étudiant en sciences religieuses, arrêté le 06 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

15-  Abderahmane Ould El Ghouth, né en 1979, étudiant en sciences religieuses, arrêté le 06 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

16-  Sid Ould Abah Al Imam, né en 1980, marin, arrêté le 06 avril 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

17-  Ismaïl Aïssa, né le 16 janvier 1972, professeur d’enseignement secondaire, et étudiant en magistère de droit, ressortissant de nationalité algérienne, résidant régulièrement en Mauritanie, arrêté le 29 mai 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

18- Abdelmadjid Belbachir, né en 1974, étudiant en sciences religieuses, ressortissant de nationalité algérienne, résidant régulièrement en Mauritanie, arrêté le 03 juin 2005, actuellement détenu à la prison civile de Nouakchott.

19-  Hamad Ould Mohamed Khirou

20-   Al Khadim Ould Al-Saman

21-   Sidi Ould Hait

Tous ont été détenus au secret pendant une période de 20 à 44 jours à l’école de police de Nouakchott pour certains d’entre eux et au commissariat d’El Mina N° 2 pour les autres, et ont été soumis à de graves actes de torture et à des traitements particulièrement inhumains et dégradants.

Pour justifier cette vague de répression, le gouvernement avait prétendu que ces personnes avaient été arrêtées dans le cadre d’une affaire concernant la sûreté intérieure de l’Etat. Elles étaient accusées d’appartenir à un groupe extrémiste agissant en dehors de tout cadre légal, exhortant à la violence et utilisant les mosquées à des fins de propagande politique sectaire.

Le 05 août 2005, l’armée s’emparait du pouvoir et un « Conseil militaire pour la justice et la démocratie », dénonçant les pratiques répressives du régime antérieur, promettait des élections démocratiques et s’engageait «  à mettre fin aux pratiques totalitaires du régime dont le peuple avait tant souffert ces dernières années. »

Le nouveau régime faisait explicitement référence aux nombreuses violations des droits de l’homme et en particulier aux arrestations des mois précédents dénoncées unanimement par toutes les ONG de défense des droits de l’homme, et reconnaissait donc de facto le caractère arbitraire de celles-ci.

Effectivement, dès le mois de septembre 2005, plusieurs personnalités arrêtées en même temps, dans les mêmes circonstances et sous les mêmes accusations que les personnes sus-mentionnées, ont été libérées dans le cadre d’une mesure d’amnistie. Mais pour des raisons inconnues, les personnes sus-mentionnées n'ont pas bénéficié de cette mesure.

Après avoir exigé vainement que leurs clients soient présentés devant un tribunal, les avocats ont demandé leur mise en liberté provisoire. Le juge d'instruction saisi a fait droit à ces demandes et ordonné la mise en liberté provisoire par ordonnance rendue le 14 septembre 2005. Le parquet a toutefois fait appel mais la chambre d'accusation de la Cour de Nouakchott a rendu le 6 avril 2006 un arrêt définitif confirmant l'ordonnance de mise en liberté.

Malgré ces décisions, les détenus n'ont pas été libérés. Le procureur de la Cour de Nouakchott s'y est opposé en introduisant un pourvoi en cassation alors que le droit interne de la Mauritanie prévoit que l'arrêt de la chambre d'accusation est exécutoire.

Le maintien en détention de ces personnes ne pouvait qu'être interprété comme une grave violation de leurs droits fondamentaux et qualifié de détention arbitraire.

Le 27 juillet 2006 huit des 18 détenus étaient libérés de la prison civile de Nouakchott. Il s'agit de:

- Mohamed Sidiya Ould Ajdoud, né en 1959, professeur, arrêté le 25 avril 2005.

- Abdellah Ould Ahmed Ould Aminou, né en 1966,  professeur et imam, arrêté le 25 avril 2005.

- Mohamed Ould Ahmed Ould Sid Ahmed, dit Al Chaer, né en 1968, poète et docteur en littérature, arrêté le 21 avril 2005.

- Mohamed Mahmoud Ould Salek,  né en 1972, chauffeur, arrêté le 02 mai 2005.

- Mohamed Al Amine Ould Hassen, né en 1984, étudiant universitaire, arrêté le 02 mai 2005.

- Mohamed Hassen Ould Mohamed Abderrahmane, né en 1981, artiste graphique, arrêté le 02 mai 2005.

- Ahmed Ould Mohamed Abdellah, né en 1964, professeur, arrêté le 03 mai 2005.

- Mohamed Al Amine Ould Salek, né en 1971, professeur,  arrêté le 03 mai 2005.

Les autres personnes ont été maintenues en détention jusqu'au 5 juin 2007, date à laquelle tous, détenus ou libérés provisoirement, ont été acquittés par la Cour de Nouakchott. Quant aux trois qui se sont échappés de prison, deux d'entre eux ont été acquittés tandis que le troisième à été condamné par contumace à une peine de prison de deux ans.