Maroc : Les Experts Onusiens Qualifient d’Arbitraire la Détention du Journaliste Salaheddine Bassir

Salaheddine Bassir صلاح الدين بصير

Salaheddine Bassir, militant et journaliste, avait été arrêté en juin 2015, torturé et détenu à Laâyoune suite à un procès inéquitable. Après la saisine du Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies (GTDA), les experts onusiens ont déclaré qu’il était détenu arbitrairement et ont appelé les autorités marocaines à le libérer. Aujourd’hui Bassir demeure détenu à la prison d’Aït Melloul dans conditions particulièrement difficiles.

Une arrestation arbitraire et un procès inéquitable

Ce sont les raisons de l’arrestation et le déroulement de son procès qui ont mené les experts du GTDA à qualifier sa détention d’arbitraire dans leur Opinion n° 11/2017 en date du 16 juin 2017. Pour rappel, le 27 mai 2013, Salaheddine Bassir s’était rendu à Smara pour filmer une manifestation en faveur de l’autodétermination du Sahara Occidental pour le compte de RASD TV, la chaîne de télévision du Front Polisario. Plusieurs manifestants présents lors de ce rassemblement avaient alors été arrêtés. Bassir qui s’était alors rendu à Tindouf en Algérie après la répression de la manifestation va être arrêté deux ans plus tard, le 8 juin 2015, alors qu’il rentrait légalement à Laâyoune par des agents des services de sécurité en tenue civile qui circulaient en voiture banalisée. Interrogé à Smara, il finira par signer, sous la contrainte, un document qu’il n’avait pas été autorisé à lire. Il découvrira après coup que ce document contenait des aveux selon lesquels il avait « planifié » et « participé aux affrontements » survenus durant la manifestation du 27 mai 2013. Il niera les faits devant le juge en déclarant qu’il avait été forcé sous la torture à signer les aveux. La Cour d’Appel a toutefois confirmé, le 14 novembre 2015, sa condamnation à quatre ans d’emprisonnement, en violation des droits de Bassir à un procès équitable.

Salaheddine Bassir « victime d’avoir exprimé son opinion politique »

Sur la base des éléments apportés par Alkarama, les experts GTDA ont ainsi qualifié dans leur Opinion n° 11/2017 la détention de Bassir d’arbitraire en violation des normes de droit international et notamment du Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (PIDCP) que le Maroc a ratifié en 1979. Notant l’absence de réponse du Gouvernement marocain sur l’existence d’autres preuves que les aveux forcés, les experts ont rappelé l’interdiction faite à l’article 14 (3) (g) du PIDCP qu’un accusé puisse être forcé à s’auto-incriminer. Le GTDA a également souligné « la pratique généralisée d’abus contre les personnes qui, comme Bassir, militent pour l’auto-détermination de la population sahraouie, en violation du droit international ». Ainsi, les experts ont considéré que ce dernier avait été « victime d’avoir exprimé son opinion politique », en violation des dispositions du Pacte International sur les Droits Civils et Politiques garantissant la liberté d’opinion et expression.

Demandes des experts onusiens aux autorités marocaines 

En conclusion, les experts onusiens ont demandé au Gouvernement marocain de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier « sans tarder » à la situation de Bassir en le libérant immédiatement et en lui accordant un droit d’obtenir réparation « conformément au droit international ». Le GTDA a prié le Gouvernement marocain de l’informer des mesures prises pour appliquer ses recommandations dans les six mois à compter de la publication de l’opinion. Enfin, le Groupe de Travail a saisi le Rapporteur Spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants des allégations de torture soulevées par Bassir.

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