MAROC : Les atteintes à la vie privée de Ouahiba KHOURCHECH, ex-officier de police, portées devant les procédures spéciales de l’ONU
Le 16 mai 2023, Alkarama a soumis une communication aux procédures spéciales de l’ONU, parmi lesquels le Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, pour les informer des multiples violations subies par Mme Ouahiba Khourchech, ancien officier de police ainsi que sa fille mineure.
Victime de harcèlements pendant ses fonctions
Mme Ouahiba Khourchech a rejoint les rangs de la sûreté nationale en 2003 avant d’être nommée quelques années plus tard chef du département de la lutte contre la violence faite aux femmes.
Paradoxalement, c’est au cours de ses fonctions que Mme Khourchech a elle-même été victime d’harcèlements sexuels de la part de son supérieur hiérarchique. Refusant de se taire, elle a alors engagé en août 2016 des procédures administratives et judiciaires pour dénoncer le traitement dont elle a été victime.
En réaction, l'administration Générale de la Sûreté Nationale (DGSN), refusant de reconnaître l'existence d’un quelconque délit, l’a non seulement suspendue de ses fonctions, mais est allé jusqu’à déposer contre elle une plainte pour « outrage à fonctionnaires publics lors de l’exercice de leurs missions et envers les corps constitués » et « dénonciation calomnieuse de crimes fictifs ».
Atteintes à son droit à la vie privée
Pour tenter d’obtenir justice, Mme Khourchech a constitué Maitre Mohamed ZIANE, un avocat particulièrement courageux et engagé, ancien ministre des droits de l’homme et ancien bâtonnier de Rabat. Connue pour ses critiques envers la politique sécuritaire du gouvernement et sa dénonciation de la corruption, l’avocat de la victime est devenu lui-même la cible des services de renseignements qui ont tout fait pour nuire à sa réputation.
Pour cela, les services de renseignement ont eu recours à des manœuvres particulièrement malhonnêtes en montant et en diffusant sur les réseaux sociaux une vidéo dans laquelle Mme Khourchech apparait dans une chambre d’hôtel en compagnie de sa fille et de son avocat, Maitre Mohamed ZIANE, avec lequel elle aurait selon ses détracteurs prétendument entretenue une relation hors mariage.
Mme Khourchech rapporte que les services de renseignements ont exercé sur elle un chantage pour qu’elle cesse de dénoncer les pratiques dont elle a été victime et la réduire ainsi au silence. Elle a alors sollicité l’expertise du National Center for Audio and Vidéo Forensics (NCAVF), un laboratoire médico-légal de médias numériques basé à Los Angeles et agréé aux Etats-Unis, lequel a démontré dans le rapport établi par Matthew "Motti" Gabler, expert médico-légal que la vidéo diffusée est effectivement un montage.
Refusant de se plier aux chantages et aux menaces des autorités et craignant pour sa vie et celle de sa famille, Mme Khourchech a finalement été contrainte de quitter le Maroc pour s’installer définitivement aux Etats-Unis. Mandatée par la victime, Alkarama s’est adressé le 16 mai 2023 aux procédures spéciales des Nations-Unies et en particulier à la Rapporteuse spéciale sur le droit à la vie privée afin de les informer de la situation de Mme Ouahiba Khourchech.
Alkarama appelle les autorités du Royaume du Maroc à respecter les termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) auquel le pays est partie et de mener des enquêtes indépendantes et impartiales à l’encontre des auteurs de violence faite aux femmes.