Maroc : Détention de Mohammed Hajib, accusé de terrorisme
M. Mohamed Hajib de nationalité allemande et marocaine a été arrêté en juillet 2009 au Pakistan. Après avoir été détenu pendant six mois, il a été libéré sans connaître le motif de son incarcération. Arrivé en février 2010 au Maroc, il a immédiatement été arrêté à l'aéroport de Casablanca et placé en garde à vue durant laquelle il a été torturé et contraint de signer des aveux sur la base desquels il a par la suite été condamné à 10 ans de prison.
M. Mohamed Hajib (محمد حاجب) est âgé de 30 ans, de nationalité allemande et marocaine, diplômé d’économie et entrepreneur en Allemagne. Sa famille réside actuellement au Maroc. Il a été arrêté en juillet 2009, un mois après son arrivée au Pakistan, au moment où il décide de se rendre immédiatement au Maroc car son fils est gravement malade.
Il a été emprisonné cinq jours avant d’être transféré avec d’autres détenus à Quetta, où il a été maintenu en détention durant six mois sans faire l’objet d’une procédure judiciaire légale ou d’une accusation précise.
Subissant des conditions de détention particulièrement difficiles, il a entamé une grève de la faim le 3 février 2010. Il a été libéré sans jugement quelques jours plus tard et un haut fonctionnaire de la police pakistanaise lui a précisé qu’aucune charge ne pesait contre lui sans pour autant lui donner les motifs de son arrestation et de sa détention.
Le 17 février 2010, M. Hajib s'est rendu au Maroc via Frankfort. A sa descente de l’avion à Casablanca, il est attendu par cinq hommes qui le menottent et embarquent de force au commissariat d’El Maarif, où il est soumis à une séance de torture.
Sa famille venue l’attendre à l’aéroport de Casablanca a tenté d’obtenir des informations sur lui mais en vain. Ce n’est que quatre jours plus tard que la police judiciaire l'a informée de sa détention.
M. Hajib n'a été déféré devant le juge d’instruction du tribunal de Salé que 12 jours plus tard, au prétexte d’appartenance à un groupe terroriste et d’association de malfaiteurs
Durant sa comparution devant le magistrat, il a fait part des tortures subies au commissariat de Maarif et du fait qu’il avait été obligé de signer un document qui ne correspondait pas à ses déclarations sous la menace des policiers d’emmener sa femme et de la violer devant lui. Le juge n’a pas accordé la moindre attention à ses déclarations.
En dépit de l’absence de toute preuve ou de tout élément matériel dans le dossier pouvant étayer les accusations dont il faisait l’objet, M. Hajib a été placé en détention provisoire à la prison de Salé. Pour protester contre les poursuites injustifiées dont il était victime, M. Hajib a entamé une grève de la faim le 10 mai 2010. Le 24 juin 2010, après quarante-six jours de grève, il a été déféré devant la juridiction de jugement et condamné à la suite d’un procès expéditif à une peine de dix années d’emprisonnement au prétexte d’avoir combattu en Afghanistan contre les armées américaine et pakistanaise.
Les juges se sont contentés de se référer aux procès verbaux de la police sans tenir compte de ses déclarations devant le juge d’instruction ni de ses déclarations devant le tribunal selon lesquelles il n’avait aucun rapport avec les accusations dont il faisait l’objet et qui avaient été signées sous la torture et la menace. Au surplus aucun élément matériel n’a été fourni par l’accusation et aucune enquête n’a été ouverte sur les allégations de torture aux divers stades de la procédure.
Le 17 mai 2011, plusieurs mouvements de protestations ont touché les prisons marocaines, notamment la prison de Salé, où les détenus condamnés pour terrorisme à la suite de procès inéquitables, ont demandé à être de nouveau jugés par des juridictions indépendantes en bénéficiant des garanties de procès réguliers.
A la suite de cette grève durement réprimée, M. Hajib a été transféré à la prison de Toulal et détenu au secret pendant 15 jours, sans que sa famille ne soit avisée de son transfert. Il a été sévèrement torturé, notamment battu, maintenu dans des positions douloureuses durant de longues périodes et menacé de viol. Le consulat d’Allemagne a finalement retrouvé sa trace et informé sa famille de son sort.
Quinze jours après son retour à la prison de Salé, gravement affecté psychologiquement, il a tenté de se suicider et a été évacué en urgence à l’hôpital. Selon sa famille, il reste à ce jour victime de mauvais traitements à la prison de Salé.
Alkarama a saisi le 26 juillet 2011 le groupe de travail sur la détention arbitraire de la situation de M. Hajib, lui demandant d’enjoindre aux autorités marocaines de produire le dossier pénal de M. Hajib afin qu’elles vérifient qu'il a été condamné sur la seule base de déclarations signées sous la torture. En conséquence, elles devront prendre les mesures nécessaires pour remédier en libérant M. Mohamed Hajib et en lui accordant une réparation adéquate
Le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans la lutte antiterroriste et le Rapporteur spécial sur la torture ont tous deux été informés de la situation de M. Hajib.