Djibouti : Premier examen par le Comité des droits de l'homme de l'ONU avec neuf années de retard

Le rapport initial de Djibouti sera examiné les 16 et 17 octobre prochains pour la première fois par le Comité des droits de l'homme de l'ONU à Genève lors de sa 109e session. Ce n'est qu'en février 2012 que l'Etat partie avait finalement soumis son rapport initial, avec plus de neuf ans de retard . Dans le cadre de ce processus d'examen qui a pour but d'évaluer la mise en œuvre des droits consacrés par le Pacte international relatif aux droits civils politiques, Alkarama a fait une déclaration devant le Comité des droits de l'homme afin de lui faire part de ses principaux sujets de préoccupation.

A la suite de la publication du rapport initial par les autorités, les experts ont crû devoir formuler une liste de questions auxquelles les réponses apportées par les autorités sont demeurées lacunaires. 

La situation des droits de l'homme dans ce pays situé dans la Corne de l'Afrique à l'entrée de la Mer Rouge et qui abrite deux importantes bases militaires Française et Américaine, est particulièrement préoccupante sans susciter toujours l'attention de la communauté internationale.

Cette situation s'est encore détériorée depuis les élections législatives du 22 février 2013 remportées par le parti présidentiel, l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) et unanimement contestées par l'opposition qui fait état de fraudes massives et de l'absence de publication des résultats par les bureaux de vote.

Les principaux dirigeants de l'opposition font face à un harcèlement sécuritaire et judiciaire sans précédent tandis que leurs sympathisants sont systématiquement arrêtés arbitrairement, détenus au secret et torturés. La plupart d'entre eux sont accusés de « participation à manifestation illicite » ou « trouble à l'ordre public » et sont condamnés à des peines d'emprisonnement. Alkarama a ainsi documenté plusieurs cas d'arrestations et détentions arbitraires, de torture et de décès suspect en détention.

Le 30 septembre dernier, à l'occasion d'un appel de l'opposition à manifester pacifiquement, les services de sécurité sont encore intervenus afin d'empêcher le rassemblement pacifique et l'ont dispersé dans la violence. Des dizaines de manifestants pacifiques ont encore été arrêtés, dont deux députés et le maire de la commune de Balbala. Toutes les victimes interrogées ont fait état de tortures et de mauvais traitements durant la période de garde à vue.

Alkarama a assisté aujourd'hui à une rencontre avec les experts du Comité des droits de l'homme auxquels elle a soumis une note d'information relatant les derniers développements dans le pays et exprimé ses principales préoccupations.

Afin d'assurer la mise en œuvre des droits protégés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Alkarama appelle les autorités de Djibouti à mettre un terme à la répression systématique et aux représailles contre les opposants politiques et leurs partisans et garantir effectivement le droit à la liberté d'expression, de réunion et d'association pacifique, ainsi que le droit à la participation politique.

Les autorités sont également appelées à prendre des mesures effectives pour s'assurer que le droit à la vie et à la dignité soient respectés, de mettre un terme à la pratique arbitraire de la déchéance de la nationalité et d'ouvrir des enquêtes indépendantes, impartiales et approfondies sur les cas de torture, d'exécutions extrajudiciaire et de décès suspects en détention.

L'examen de Djibouti sera l'occasion pour le Comité des droits de l'homme d'établir un dialogue avec les autorités sur la base de leur rapport initial et des informations soumises par la société civile. Les recommandations qui seront émises par les experts sont particulièrement attendues et feront l'objet d'un suivi attentif de notre organisation.