Syrie : deux dirigeants religieux détenus au secret risquent la torture

Depuis la publication le 16 octobre 2005 de la " Déclaration de Damas pour le changement national et démocratique " en Syrie, le gouvernement syrien a arbitrairement emprisonné des centaines de militants politiques et défenseurs des droits de l'homme dans une tentative de réduire au silence l'appui grandissant pour cette déclaration. Le gouvernement syrien continue d'emprisonner arbitrairement ceux qui s'opposent ou critiquent les politiques du gouvernement y compris des responsables de communautés religieuses, des militants de droits de l'homme et des réformateurs.

Alkarama a adressé le 2 décembre 2009 un appel urgent aux Rapporteurs spéciaux sur la torture et sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression pour leur demander d'intervenir dans les cas de Yusuf Al-Dheeb et de Abdurrahman Kouki. Ces deux personnes sont des responsables religieux connus pour leurs positions critiques vis-à-vis du gouvernement. Ils sont en ce moment détenus au secret et risquent de subir des tortures.

Abdurrahman Kouki
Abburrahman Kouki, âgé de 40 ans, a été convoqué par les services de renseignement syriens à Damas le 22 octobre 2009 et a été immédiatement arrêté. Il revenait du Qatar où il était intervenu dans l'émission de Faisal Qassem, "  Al-Ittijah al-mu'akes ", de la chaîne satellitaire Al-Jazeera, aux côtés du militant égyptien Hafez Abu Saada. Il n'y a aucun doute que son arrestation et sa détention secrète font suites aux positions exprimées lors de cette émission. À ce jour, sa famille n'est pas été informée des raisons de son arrestation ni du lieu de sa détention.

Yusuf Abdullah Al-Dheeb
M. Al-Dheeb, âgé de 44ans, a été arrêté le 15 novembre 2009 à son domicile à Deir al-Zour par des hommes armés, en tenue civile, qui ne se sont pas identifiés mais qui semblaient appartenir aux services de renseignements. M. Al-Dheeb est membre du Conseil national de la Déclaration de Damas, et une personnalité connue à Deir al-Zour en tant qu'arbitre dans la résolution de conflits au sein des familles et des clans au niveau local.

Sa famille est restée sans nouvelles de lui et ne connaît pas son lieu de détention. Elle est particulièrement préoccupée des tortures qu'il peut subir pendant sa détention secrète qui vont aggraver son insuffisance rénale chronique et sa hypertension demandant une surveillance médicale et des médicaments.

Plusieurs ONG internationales sont intervenues auprès des autorités syriennes dans le cas de M. Al-Dheeb. En Syrie, depuis l'état d'urgence instauré en 1963 par le parti Baath, les groupes d'opposition et les organisations de défense des droits de l'homme sont interdits à moins d'être autorisés par le parti. L'emprisonnement de militants, la fermeture de sites internet, la censure de blogueurs et les interdictions de voyage ne sont que quelques méthodes utilisées pour maintenir les opposants du gouvernement à distance.

De nombreuses personnes ont été arbitrairement emprisonnées en raison de leur signature de la Déclaration de Damas, notamment sa présidente Fida Al-Hurani, son secrétaire général Riad Seif (les deux sont aujourd'hui condamnés pour avoir " répandu de fausses informations qui affaiblissent le moral de la nation ") et Haitham Al-Maleh dont l'affaire a été soumise aux Nations Unies en octobre 2009 par Alkarama.

La déclaration de Damas stipule :"Un Etat moderne doit être établi. Son régime politique doit être fondé sur un nouveau contrat social, inscrit dans une constitution démocratique moderne faisant de la citoyenneté le critère d'appartenance, instituant la pluralité, l'alternance pacifique au pouvoir, l'Etat de droit. Tous les citoyens y ont les mêmes droits et devoirs, hommes ou femmes, quel que soient leur religion, leur ethnie, leur communauté. Cette constitution doit empêcher le retour du despotisme sous de nouvelles formes."

Alkarama continue de suivre les cas des MM. Al-Dheeb et Kouki et informera les procédures spéciales des Nations Unies des prochains développements.