Liban : D'importantes violations des droits de l'homme à adresser au prochain Examen Périodique Universel

Le 23 mars 2015, Alkarama a soumis son rapport sur la situation des droits de l'homme au Liban au Conseil des droits de l'homme en vue de son Examen périodique universel (EPU) prévu le 3 novembre 2015. Alkarama a relevé les violations les plus importantes persistant encore au Liban et dénonce ainsi l'usage généralisé de la torture, le recours à la détention arbitraire et les violations du droit à un procès équitable. Le rapport d'Alkarama souligne également l'absence de mise en œuvre de plusieurs recommandations formulées lors de son premier EPU ayant été acceptées par le Liban.

En dépit de la ratification par le Liban de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (UNCAT) ainsi que de son Protocole facultatif (OPCAT), la torture demeure une pratique courante au Liban. En octobre 2014, à la suite d'une enquête basée sur un rapport d'Alkarama, le Comité contre la torture (CAT) a en effet conclu que la torture « est une pratique largement répandue et couramment utilisée par les forces armées et les organes chargés de l'application de la loi pour enquêter ». En outre, la législation nationale ne contient qu'une définition floue de la torture ce qui contribue au climat général d'impunité.

Alkarama dénonce également le recours abusif à la détention préventive par les autorités judiciaires, en particulier lors des crises sécuritaires majeures et notamment des affrontements armés à Tripoli et Arsal en 2014. La détention préventive peut ainsi durer plusieurs années, tout particulièrement dans les affaires d'« atteintes à la sûreté de l'État » et de « crimes de terrorisme » où la détention peut alors, en vertu de la législation nationale, être illimitée.

Il est important de souligner que la violation du droit à un procès équitable prend plusieurs formes. La détention au secret, le déni de l'accès à un avocat avant le procès pour préparer sa défense et l'utilisation d'aveux extorquées sous la torture comme élément de preuve sont des pratiques qu'Alkarama dénonce dans son rapport, les considérants comme de graves lacunes du système judiciaire libanais qui peuvent conduire à des violations.

De plus, les juridictions telles que le Haut Conseil Judiciaire ainsi que le Tribunal militaire ne peuvent pas être considérés comme indépendantes. En effet, Le Haut Conseil Judiciaire est composé de juges nommés par le pouvoir exécutif et ses décisions ne sont pas susceptibles de recours. En plus d'avoir compétence sur des civils, ce qui représente en soi un manque d'indépendance et d'impartialité, le Tribunal militaire peut tenir des procès dans le secret, ou sans la présence d'un avocat.

Enfin, même si un moratoire sur la peine de mort existe de fait depuis 2004, 28 condamnations ont été prononcées – notamment par le Conseil judiciaire – et ceci uniquement entre les mois de janvier et février 2015. En septembre 2011, un amendement à la législation libanaise a été adopté créant ainsi le statut juridique de « condamné à mort sans avoir été exécuté ». Craignant que cette mesure ne soit qu'une excuse pour retarder l'abolition de la peine de mort, Alkarama demande plutôt que la peine capitale soit abolie au Liban.

Le rapport soumis par Alkarama suggère 21 recommandations à adresser au Liban lors du prochain EPU, en vu d'améliorer le respect des droits de l'homme au Liban.

L'Examen périodique universel (EPU) consiste en un examen de la situation des droits de l'homme tous les quatre ans par le Conseil des droits de l'homme de tous les États membres de l'ONU. Les examens ont lieu dans le cadre d'une discussion interactive entre l'État examiné et les autres États membres de l'ONU. Les ONG peuvent soumettre des informations auxquelles les Etats participants à la discussion peuvent se référer. En novembre 2014, le Liban sera examiné pour la deuxième fois.

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