Égypte : Les forces de sécurité perquisitionnent dans 6 bureaux d'organisations de la Société Civile au Caire

Le Caire, Genève

Aujourd'hui, 6 bureaux d'ONG locales et internationales situés en Égypte ont été perquisitionnés par des équipes d'enquêteurs et de procureurs accompagnés de militaires et de forces de sécurité en uniformes. Des mandats ont été délivrés pour fouiller et enquêter sur un total de 17 organisations, avec comme chefs d'accusation de « recevoir des fonds provenant de pays étrangers » et autres crimes selon la « loi NGO » très critiquée de 2002.

Les organisations inspectées aujourd'hui sont :
1. Le Centre arabe pour l'indépendance de la justice et des professions juridiques (ACIJP)
2. l'Observatoire budgétaire et des droits humains
3. L'Institut National démocratique (NDI) (bureaux du Caire et d'Assiout)
4. L'International Republic Institute (IRI)
5. Freedom House
6. La fondation Konrad Adenauer

Les mandats stipulent que tous les papiers, documents, publications et appareils pouvant servir à commettre les crimes en cours d'investigation seront confisqués. Le personnel de ces organisations a été mis en garde contre l'utilisation de leurs téléphones et ordinateurs portables, et ordinateurs et ont été isolés du reste du monde. De plus, en ce qui concerne au moins les bureaux de l'ACIJP, les autorités ont restreint l'accès à l'ensemble de l'immeuble, empêchant les gens d'y entrer ou d'en sortir.
Au vu des sérieuses conséquences que de telles mesures de répression pourraient avoir sur les organisations de la société civile égyptienne ; en particulier au moment où le nombre de violations des droits de l'homme rapportées par celles-ci et par d'autres organisations augmente quotidiennement et va certainement continuer à augmenter tandis qu'arrive le premier anniversaire de la révolution égyptienne de 2011 ; Alkarama a appelé le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme à prendre de toute urgence des mesures vis-à-vis du Conseil Suprême des Forces Armées (CSFA) et le gouvernement égyptien pour leur rappeler leurs obligations internationales de protéger les défenseurs des droits de l'homme, selon la Déclaration relative aux défenseurs des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale en mars 1998.
En particulier, paragraphe 5 de la résolution de l'Assemblée générale de 2009 relative aux défenseurs des droits de l'homme, dans lequel l'Assemblée générale :

5.         appelle également les États à respecter, protéger et assurer les droits à la liberté d'expression et de réunion des défenseurs des droits humains et à cet égard, assurer, quand des procédures d'inscription des organisations de la société civile existent, que celles-ci soient transparentes, non discriminatoires, diligentes, économiques, qu'elles donnent la possibilité d'appel et évitent la nécessité d'une réinscription, selon la législation nationale, et soient conformes à la loi internationale relative aux droits de l'homme.

Alkarama demande aux autorités égyptiennes de présenter immédiatement la loi ONG au Parlement nouvellement élu pour qu'elle soit révisée, comme cela a été fait pour la loi sur les partis politiques et celle sur les syndicats.

Finalement, Alkarama appelle le rapporteur spécial sur la liberté d'association et celui sur la liberté d'expression à demander une autorisation de visiter l'Égypte immédiatement, pour rencontrer les ministres appropriés, les organisations de la société civile, les autorités judiciaires et certains membres parlementaires afin de les guider sur la révision de cette loi pour que celle-ci soit conforme à la loi internationale. Le rapporteur spécial devrait également demander aux autorités égyptiennes ainsi qu'à la société civile que l'on réponde à ses questions concernant les meilleures pratiques pour le respect du droit d'association au vu du contexte actuel.

Rappelons tout de même qu'à l'heure actuelle, ces attaques contre les droits des personnes de se réunir librement ne sont pas les pires ni les plus violentes en Égypte ; torture, détention arbitraire et disparitions ayant lieu régulièrement ; ces attaques contre les ONG qui mettent en lumière les violations les plus graves commises par les forces de l'État pourraient signifier une censure de la divulgation de violations futures. Nous ne pouvons permettre que les voix dénonçant quotidiennement les violations les plus sérieuses en Égypte soient réduites au silence.