Egypte : Le projet de loi sur les manifestations restreint le droit à la liberté d'expression

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Egypt ShuraCouncil

Alkarama a appelé aujourd'hui le Conseil d'Etat égyptien à réviser les articles de la loi sur les manifestations qui sont contraires aux normes internationales relatives aux libertés d'expression, d'opinion, de rassemblement et de réunion.

Les quatre premiers articles de cette loi ayant déjà été approuvés, les commissions compétentes du Conseil d'Etat viennent d'en accepter le cinquième. Ce dernier en particulier est contraire aux revendications de la société civile égyptienne, qui réclame le respect de ses droits fondamentaux, en particulier la liberté d'expression, pour lesquels elle s'est révoltée et battue.

La loi sur les manifestations comporte de nombreux articles dont la teneur est discutable. Le deuxième article, par exemple, restreint le droit des citoyens à manifester. Ainsi, tout manifestant n'étant pas de nationalité égyptienne sera considéré comme hors la loi, la liberté d'exprimer son opinion étant pourtant un droit fondamental dont doit disposer chaque être humain. L'article 4, quant à lui, contient des expressions telles que la sécurité générale, l'intérêt des citoyens et la perturbation de la circulation, dont la formulation vague et non explicite pourrait être préjudiciable aux manifestants.

Le délai durant lequel le ministère de l'Intérieur doit être prévenu de la tenue de toute manifestation est passé de 72 à 24 heures, contrairement à ce qui avait été proposé. Le Conseil d'Etat a également refusé que soit intégrés au texte les procédures d'exception et les rassemblements spontanés.

Parmi les articles contraires aux droits de l'homme et qui n'ont pas encore été approuvés figure l'article 9, qui interdit aux manifestants d'approcher à moins de 200 mètres des bâtiments gouvernementaux, législatifs et judiciaires ainsi que des sièges des autorités locales. Cet article prive donc les citoyens de la possibilité de faire entendre leurs voix et leurs revendications aux responsables. L'article 13, quant à lui, discrimine les citoyens sur des critères vestimentaires : il interdit en effet aux manifestants de porter des masques ou de se cacher le visage.

L'article 15 permet en outre à la police de disperser les manifestants selon une procédure graduelle : ils doivent d'abord prévenir verbalement les manifestants, puis peuvent utiliser les canons à eaux et enfin les gaz lacrymogènes. L'article précise cependant que ces mesures sont à « prendre en compte autant que possible », ce qui peut laisser craindre une utilisation excessive de la force par la police. Vient ensuite l'article 16, qui conformément au Code Pénal et à la Loi sur la Police, permet aux forces de l'ordre d'utiliser des balles réelles contre les manifestants.

Ahmed Mefreh, chercheur juridique au bureau d'Alkarama au Caire a déclaré: « Les articles qui ont été entérinés restreignent la liberté de manifester et entravent ce droit pourtant garanti par la Constitution égyptienne et les traités internationaux. » Et d'ajouter: «Il est nécessaire que les commissions qui siègent actuellement pour examiner ce projet législatif tiennent compte des lois et conventions internationales pour la formulation des articles, contrairement à ce qui a été fait ces dernières semaines pour les cinq qui ont d'ores et déjà été approuvés. Nous restons en outre préoccupés par la teneur de nombreux articles qui n'ont pas encore été adoptés."