Egypte : Deux citoyens torturés durant des mois pour avoir participé aux manifestations

C'est à quelques pas de la place Tahrir où ont débuté les manifestations du 25 janvier 2011 qu'Abderahman Fares, 30 ans, et quatre de ses amis qui avaient comme lui activement participé à la révolution, ont été arrêtés par des militaires le 1er février 2011.
Extraits de force de leur véhicule, les cinq hommes sont immédiatement emmenés dans les locaux des Services de sécurité, ils seront victimes de graves tortures. Violemment battu et torturé à l'électricité pendant son interrogatoire, M. Fares sera notamment questionné sur l'organisation des manifestations et sur ses dirigeants.

C'est sensiblement la même histoire qui se déroulait à quelques jours d'intervalle, le 29 janvier, à Backus près d'Alexandrie. Alors qu'il se rendait en voiture, accompagné de son voisin, à l'hôpital où est soignée sa mère, M. Mohamed Ibrahim Al Said Ibrahim, 26 ans, est arrêté par des militaires. En dépit des ses explications, il sera arrêté et emmené avec son voisin au camp militaire du Troisième District après avoir été dépossédé de la somme de 280 livres égyptiennes qu'il avait en sa possession.

Torturé avec une douzaine d'autres hommes, il est dans un premier temps transféré vers une prison militaire puis à la prison de Hadra au Caire, sans que les tortures ne cessent. Il sera tour à tour violemment battu, brûlé avec des cigarettes et torturé à l'électricité. Il ne sera libéré qu'après vingt-et-un jours de calvaire le 14 février 2011. M. Fares quant à lui a été détenu pendant trois mois avant d'être enfin relâché le 3 mai 2011, longtemps après la chute du régime de Moubarak et la fin des manifestations. Aucun mandat d'arrêt n'avait été présenté au cours de leurs arrestations, et les deux hommes ont été relâchés sans jamais avoir été déférés devant une autorité judicaire.

Depuis le début des manifestations le 25 janvier 2011, la police et les services de sécurité se sont rendus coupables de détentions arbitraires et de graves violences à l'encontre des manifestants, violant ainsi de nombreuses conventions internationales. Après le retrait de la police de la scène à la suite du « vendredi de la colère » le 28 janvier 2011, ce sont les miliaires qui ont été chargés d'assurer la sécurité dans les principales villes. De nombreux observateurs espéraient alors que ce changement de situation garantirait la fin de la torture mais de nombreux cas continuent cependant à nous parvenir.

Alkarama craint une résurgence de cette pratique courante dans le passé, raison pour laquelle elle a soumis ces deux cas au Rapporteur spécial pour la torture le 26 mai 2011. Elle appelle les autorités égyptiennes à prendre toutes les mesures nécessaires en vue de la protection de ses citoyens et de leur droit à s'exprimer librement, et demande instamment aux autorités de garantir l'intégrité physique et morale de tous les détenus, en accord avec les lois internes et internationales auxquelles le pays a souscrit.