EAU : Un Jordanien de 25 ans torturé et emprisonné sur de fausses accusations à Abou Dhabi

Rami Al Mrayat, un Jordanien de 25 ans et ancien employé de l'entreprise de maintenance d'une compagnie aérienne du Golfe, a été arrêté par les services de sécurité émiratis le 19 novembre 2011 à l'aéroport international d'Abou Dhabi alors qu'il s'apprêtait à retourner dans son pays. Torturé et détenu au secret pendant près de cinq mois, il a été transféré le 4 avril 2012 à la prison d'Al Wathba à Abou Dhabi. Quatre mois plus tard, le Jordanien a été condamné à cinq ans de prison, verdict prononcé sur la seule base d'aveux extorqués sous la torture.

Arrêté à l'aéroport d'Abou Dhabi par les services de sécurité alors qu'il s'apprêtait à rentrer en Jordanie
Rami Al-Mrayat, jeune diplômé de l'école d'aviation jordanienne, est arrivé aux Emirats arabes unis en 2009 pour un premier emploi de technicien au sein de l'entreprise de maintenance d'une compagnie aérienne du Golfe à Abou Dhabi.

Après deux visites en Iran en 2010 et 2011 pour y retrouver des amis, M. Al Mrayat a été détenu alors qu'il devait rentrait en Jordanie. Il y avait trouvé un nouvel emploi en tant qu'apprenti pilote dans l'entreprise « Jordan Aviation » à Amman.

Le 19 novembre 2011, à l'aéroport international d'Abou Dhabi, muni de sa carte d'embarquement, Rami s'apprêtait à passer le poste de contrôle de passeports. Là, on lui a dit qu'il n'était pas autorisé à quitter le pays. Des agents des services de sécurité l'ont immédiatement arrêté et emmené chez lui, à l'appartement de ses parents.

Les agents ont alors perquisitionné son domicile sans même présenter de mandat de justice ou un autre document officiel. Après deux heures, ils ont saisi tous ses effets personnels, en disant à ses parents qu'ils l'emmenaient à « la maison d'accueil » et qu'il serait de retour dans moins de 24 heures.

A l'intérieur de "la maison d'accueil": privation de sommeil, coups et chocs électriques
Ce que les agents ont appelé "la maison d'accueil" devant les parents de Rami n'avait rien d'accueillant : il s'agissait en réalité d'un centre de détention secret placé sous le contrôle des services de sécurité émiratis. Le jeune Jordanien n'y a pas passé 24 heures mais bien quatre mois et demi à être interrogé et torturé. Les yeux bandés, insulté, privé de sommeil, électrocuté et battu, Rami a été gravement torturé par les services de sécurité émiratis qui l'ont forcé à signer de faux aveux déclarant qu'il espionnait les Emirats pour le compte de l'Iran.

Le 4 avril 2012, M. Al Mrayat a été transféré à la prison d'Al Wathba à Abou Dhabi et pour la première fois a pu rencontrer son avocat.

Procès inéquitable : aucune preuve matérielle, 5 ans de prison, aucune possibilité de faire appel
Le procès de Rami Al-Mrayat a débuté le 28 mai 2012. Il a été présenté directement devant la Cour suprême fédérale à Abou Dhabi sans avoir été déféré devant un tribunal de première instance, en violation des articles 25 et 40 de la constitution émiratie.

L'accusation n'a été en mesure de produire aucune preuve matérielle contre M. Al Mrayat au tribunal alors qu'une fouille complète a été effectuée au domicile, que les services l'ont accusé d'être en contact avec des « agents iraniens » et qu'ils ont affirmé que la victime était placée sous surveillance par leurs soins depuis un an et demi. Aucun enregistrement d'appels téléphoniques, aucune vidéo n'a été présentée. Aussi, Rami a été accusé sur la seule base d'aveux extorqués sous la torture alors qu'il était détenu au secret.

De plus, ni Rami Al Mrayat, ni son avocat n'ont été autorisés à s'entretenir au cours des audiences. Son avocat n'a pu soumettre qu'un mémorandum écrit au début du procès et n'a pas pu assurer la défense de son client au cours des différentes sessions.

Après six audiences ne dépassant pas 15 minutes chacune, la Cour a condamné Rami Al Mrayat le 30 juillet 2012 à 5 ans de prison. L'avocat de la victime n'a pas la possibilité de faire appel à la condamnation prononcée par ce tribunal, en vertu de l'article 67 de la loi établissant la Cour fédérale suprême. L'impossibilité de faire appel à la condamnation constitue une violation des standards internationaux relatifs à un procès équitable et de l'article 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Alkarama a soumis aujourd'hui le cas de Rami Al Mrayat au Groupe de travail sur la détention arbitraire, lui demandant d'intervenir auprès des autorités émiraties. Nous appelons les Emirats arabes unis à libérer immédiatement M. Al Mrayat et à mettre un terme aux graves violations dont il a été victime.

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