EAU: Un jeune détenu syrien en grève de la faim est transféré dans un hôpital d'Abou Dhabi

Il y a deux jours, Musab Al Abood, détenu syrien de 26 ans a été transféré à l'hôpital d'Abou Dhabi. Son état de santé s'est gravement détérioré après près d'un mois d'une grève de la faim qu'il a entamée pour protester contre sa détention arbitraire. Son histoire est presque passée inaperçue avec la vague de répression sans précédent qui a récemment touché plusieurs dizaines de défenseurs des droits de l'homme et de militants politiques dans le pays et la condamnation après un procès inéquitable de l'ancien juge Ahmed Al Zaabi. Pourtant, Musab Al Abood est lui aussi victime des autorités émiraties: torturé, détenu arbitrairement et procès inéquitable.

Musab Al Abood travaillait comme chauffeur de poids lourd aux Emirats, un emploi qui lui permettait de nourrir sa femme et ses enfants restés chez lui en Syrie. Musab a été arrêté le 6 mai 2011 à Abou Dhabi et immédiatement incarcéré dans la prison de la sûreté de l'Etat de la ville. Pendant trois mois, il a été placé dans une cellule d'isolement. Il a été forcé de signer de faux aveux alors qu'il avait les yeux bandés après avoir été torturé. Le 8 août 2011, on lui dit qu'il va être emmené à l'aéroport pour être déporté vers son pays d'origine. En réalité, il n'en est rien. Le véhicule l'amène au bureau du Procureur près de la sûreté de l'Etat à Abou Dhabi dans une velleité des autorités de respecter un semblant de procédure judiciaire, trois mois après l'arrestation de M. Al Abood.

Le jeune Syrien a été interrogé sur son rôle dans l'organisation des mouvements de soulèvement en Syrie et se ses liens avec les groupes rebelles de l'opposition. On lui a posé des questions sur des personnes impliquées dans les manifestations en Syrie, leur profil, leurs objectifs et leurs supporteurs. Il a été aussi interrogé au sujet de ses « activités » en Irak entre 2003 et 2004 à la suite de l'intervention américaine. La victime a nié toutes les allégations selon lesquelles il aurait été impliqué dans une organisation « terroriste » en Irak et en Syrie.

Musab Al Abood a ensuite été transféré à la prison Al Wathba à Abou Dhabi où il a été à nouveau placé à l'isolement, cette fois pendant neuf jours. Il est resté détenu en-dehors de toute procédure légale jusqu'au 22 janvier 2012, date de sa première audience, plus de huit mois après son arrestation.

En mai 2012, il a été condamné à trois mois de prison sur la seule base d'aveux extorqués sous la torture. Le 27 juin, il a décidé d'entamer une grève de la faim pour protester contre le verdict et son traitement en détention.

Alkarama a été informée par la famille de la victime que l'état de santé de Musab se détériorait gravement et qu'il avait été transféré il y a deux jours dans un hôpital d'Abou Dhabi.

Alkarama appelle les autorités émiraties à respecter ses obligations en vertu de l'article 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de l'article 26 de la Constitution émiratie qui interdisent expressément la pratique de la torture. Nous rappelons également aux Emirats qu'ils ont l'obligation d'offrir toutes les garanties pour que la détention et le traitement de Musab Al Abood en détention soient en conformité avec les principes de traitement des prisonniers. Les autorités ont le devoir d'ouvrir une enquête sur les allégations de torture dont a été victime M. Al Abood et de le rejuger lors d'un procès en conformité avec les normes internationales de procès équitable ou le libérer immédiatement.

Alkarama a soumis son cas aujourd'hui au Groupe de travail sur la détention arbitraire de l'ONU pour lui demander d'intervenir auprès des autorités émiraties.