Arabie Saoudite: sévère condamnation pour la détention arbitraire de Dr. ben Zair

Le Groupe de travail sur la détention arbitraire vient d'informer Alkarama de son avis 36/2008 du 21 novembre 2008 dans lequel il constate de graves violations des droits du Dr. Said ben Mubarek ben Zair, détenu au secret depuis son arrestation le 6 juin 2007 par les services de renseignements.

Dr. Ben Zair, professeur des sciences de l'information à l'université de Ryadh, est une personnalité connue dans le pays pour ses prises de position publiques en faveur de la nécessité de réformes institutionnelles dans le pays ainsi que son soutien au " Mouvement des réformes ".

Le Dr Ben Zair avait par le passé déjà été emprisonné plusieurs fois sans jugement et sans avoir jamais fait l'objet de poursuites légales. Il a connu des conditions de détention au secret particulièrement pénibles durant plus de 10 années, au cours desquelles il n'a jamais eu accès à un avocat ou à des visites familiales.

Il avait notamment été détenu pendant plus de 08 années, du 05 mars 1995 au 24 mars 2003 puis arrêté une seconde fois le 20 avril 2004 pour avoir accordé une interview à la chaîne de télévision Al Jazeera.

Le 19 septembre 2004, il a été condamné à 05 années de réclusion criminelle à la suite d'un procès inéquitable au cours duquel aucun de ses droits fondamentaux n'a été respecté. Il n'a jamais eu accès au dossier de l'accusation ni pu bénéficier d'un avocat pour l'assister au cours de son jugement.

Alkarama qui avait depuis la dernière arrestation du Dr. Ben Zair adressé plusieurs communications au Groupe de travail constatait pour sa part la violations de plusieurs principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de la loi saoudienne.

Dans sa réponse au Groupe de travail, le gouvernement saoudien a indiqué que la détention du Dr. ben Zair était justifiée et se basait sur les informations établissant notamment son implication dans des actes terroristes commis dans le Royaume ; mais aussi la rétention d'informations à propos de certains responsables d'attentats à la bombe sur des installations pétrolifères ; le soutien financier de l'attentat à la bombe sur la raffinerie de pétrole de Abqaiq et ses positions quant à la présence américaine en Irak.

Alkarama, sollicitée à son tour par le Groupe de travail, constatait que Dr. Ben Zair qui était toujours maintenu en détention au secret, n'avait jamais eu accès à un avocat ni à une toute autre personne du monde extérieur. Ce n'est que lors du décès de son fils qu'il a été autorisé à sortir pendant trois jours de prison. A cette occasion il a rapporté à sa famille avoir été torturé et maltraité. Alkarama considère qu'il est poursuivi uniquement pour l'expression de ses positions politiques.

Dans son avis, le Groupe de travail relève que le gouvernement ne précise pas qui a ordonné l'arrestation du Dr. Ben Zair, quels actes terroristes il aurait commis, à quelles dates ils auraient été commis, s'ils ont causé des morts et des blessés et de quelle manière Dr. Ben Zair aurait aidé d'autres à les commettre.

Le Groupe de travail relève le fait qu'il est emprisonné pour la troisième fois et qu'en 2005 déjà, il avait émis un avis constatant l'arbitraire de cette détention. Il constate que cette fois-ci encore la détention ne repose sur aucune base légale.

De plus, selon le Groupe de travail, le Dr. Ben Zair n'a été accusé d'aucun acte criminel spécifique en particulier de nature terroriste. Malgré cela il est accusé d'avoir exprimé son opinion à propos de l'obligation de combattre en Irak. En définitive, il est privé de sa liberté arbitrairement pour ses idées politiques, ce qui est en contradiction avec le droit légitime d'opinion et d'expression.

Et finalement les experts constatent que le Dr. Zair n'a pas été présenté devant un juge, n'a pas été jugé lors d'un procès impartial et indépendant ; qu'il ne peut déposer de recours ou être défendu par un avocat ; mais aussi qu'il est détenu au secret depuis un an et cinq mois.

En conséquence, le Groupe de travail constate que la détention du Dr. Said ben Mubarek ben Zair viole les articles 9 (droit à ne pas être arbitrairement arrêté et détenu), 10 (droit à la justice) et 11 (présomption d'innocence) de la déclaration universelle des droits de l'homme.

Le Groupe de travail prie le gouvernement saoudien de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation du Dr. Ben Zair et à la mettre en conformité avec les normes et les principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. Il conseille en outre au gouvernement de ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.