ARABIE SAOUDITE : LE CAS DE KHALED AL RASHED PORTÉ A NOUVEAU DEVANT L’ONU

خالد الراشد

Le 30 novembre 2022, Alkarama a alerté le Groupe de travail de l’ONU sur les détentions arbitraires concernant sur la situation de M. Khaled Bin Mohamed AL RASHED, détenu depuis 2006 et qui avait été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour avoir émis des critiques publiques sur la politique des dirigeants du pays.

Alors qu’il aurait dû être libéré le 6 octobre 2020, après avoir purgé la totalité de sa peine, il a été à nouveau condamné, pour les mêmes faits, à 25 années d’emprisonnement supplémentaires l'issue d'un procès inéquitable.

Un premier avis du Groupe de travail de l’ONU

M. Al Rashed est un membre connu du mouvement des "réformateurs" qui a été arrêté le 19 mars 2006 à la Mecque, alors qu'il accomplissait le pèlerinage religieux de la "Omra" avec son épouse. Ce n’est qu’un mois après cette arrestation arbitraire opérée par les services des Mabahiths (Renseignements) que sa famille a pu apprendre qu’il avait été soumis à la torture au cours de sa détention au secret.

Cette arrestation s'est produite peu de temps après qu'il ait publiquement critiqué la politique internationale des autorités. Sollicitée par ses proches, Alkarama a soumis, une première fois, son cas au Groupe de travail sur la détention arbitraire (GTDA) qui a rendu l'Avis n° 4/2007 (ARABIE SAOUDITE) qualifiant sa détention d’arbitraire et appelant ainsi les autorités à le libérer.  

Cependant, malgré cet Avis, le gouvernement saoudien n'a jamais pris aucune mesure pour remédier à la situation ; au contraire, M. Al Rashed a été condamné à 5 ans d'emprisonnement lors d'un procès à huis clos et sans avocat. Lorsqu’il a fait appel le 6 avril 2009 de cette décision injuste, le juge a encore triplé sa peine et l'a condamné à 15 ans sans jamais lui donner l'opportunité de se défendre des charges qui pèsent contre lui ou d'être assisté par un avocat.

La famille de M. Al Rashed estime que ce jugement, rendu deux ans après la publication de l'avis du Groupe de travail, constitue une forme de représailles à la suite de la soumission de son cas aux procédures spéciales des Nations unies.

Une seconde condamnation sur la base des mêmes faits

Bien que M. Al Rashed aurait dû être libéré le 6 octobre 2020, après avoir purgé la totalité de sa peine prononcée le 6 avril 2009, il a été condamné une nouvelle fois à la suite d'un procès inéquitable.

A l’instar de nombreux prisonniers politiques qui ont purgé leur peine, M. Al Rashed a été sommé de « reconnaître publiquement ses erreurs ».

Suite à son refus de se plier à leurs injonctions, il a été convoqué en février 2022, par la Cour pénale spéciale, et a été de nouveau jugé sur la base des mêmes faits pour lesquels il avait déjà été condamné le 6 avril 2009.  Au cours de ce procès, il lui a été demandé de revenir sur ses anciennes déclarations, ce qu'il a refusé, suite à quoi il a été condamné à 25 ans de prison supplémentaires.

A l'évidence, aucun fait nouveau de nature pénale n'a été établi à son encontre qui justifierait une peine aussi lourde. La seule raison de cette nouvelle condamnation est son refus d'obtempérer aux injonctions des autorités qui considèrent qu’il représente encore un danger en raison son autorité morale dans la société saoudienne et de sa liberté de pensée incompatibles avec la monarchie absolue.

D’un point de vue du droit, il est évident que M. Al Rashed a été condamné, en violation du principe fondamental du ne bis in idem, en raison des mêmes faits pour lesquels il avait déjà été condamné définitivement en 2009 et qui relevaient de son droit à la liberté de conscience, d'expression et d'opinion.

Particulièrement préoccupée par ces graves violations, Alkarama a donc saisi le Groupe de travail de l’ONU sur les détentions arbitraires afin d’enjoindre à l’Arabie Saoudite de mettre en œuvre l’avis rendu en 2009 et de libérer sans délai M. Al Rashed.