Arabie Saoudite : De l'amnésie de la justice saoudienne

Appelé à comparaître après plus de huit ans derrière les barreaux sans aucune procédure judiciaire, un détenu saoudien refuse de se faire entendre par le juge. Il dénonce par là une justice amnésique qui oublie – pendant de longues années- les milliers de prisonniers détenus arbitrairement.

Suleyman Al Alouane a été appelé à comparaître devant M. Salah Laajiri, le juge de la Cour pénale spéciale de Riyadh le 14 octobre 2012. C'est la première fois après plus de huit ans de détention que la justice saoudienne semble se souvenir de lui. Plus de huit ans sans aucune procédure légale. Détenu à la prison d'Al Tarfiya, il a cependant refusé de se rendre à sa convocation pour protester contre l'absence d'indépendance de la justice saoudienne.

M. Al Alouane, aujourd'hui âgé de 43 ans, avait été arrêté en avril 2004 par des agents des services de renseignement saoudiens puis emmené dans les locaux du ministère de l'intérieur pour y être interrogé et torturé. Il aura passé plus de huit en détention dans les prisons d'Al-Hayr et d'Al Tarfiya sans qu'aucune procédure judiciaire n'ait été initiée. Pour la première fois depuis huit ans, il a été cité à comparaître devant le tribunal pénal spécial de Riyadh. Néanmoins, pour protester contre sa détention arbitraire et l'absence d'indépendance de la justice saoudienne, il a refusé de se rendre au tribunal.

Le tribunal pénal spécial de Riyadh est une juridiction d'exception qui a été instituée 2008 à la demande du ministre de l'intérieur par le conseil suprême de la justice. Elle est composée de magistrats choisis par le  ministre de l'Intérieur. Le juge qui devait présenter les accusations à la victime n'est autre que M. Salah Laajiri, le juge qui avait condamné Dr Saud Al Hashimi, lauréat du Prix Alkarama 2012 à 30 ans d'emprisonnement en novembre 2011. 

L'affaire de Suleyman Al Alouane ne fait pas exception. Les groupes de défense des droits de l'homme locaux rapportent qu'il y a des milliers de détenus dans le Royaume qui seraient emprisonnés pendant des années sans aucun jugement.

Alkarama a informé aujourd'hui le Groupe de travail sur la détention arbitraire des développements dans cette affaire. En 2008, le groupe onusien avait déjà confirmé le caractère arbitraire de la détention de M. Al Alouane et appelé les autorités saoudiennes à le juger ou à le libérer.

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