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Un gigantesque incendie a ravagé aujourd'hui les plus grandes archives juridiques du Yémen, celles de l'organisation de defense des droits de l'homme Houd, partenaire local d'Alkarama. Certains émettent l'hypothèse que les uniques bénéficiaires de cet incident ne sont autres que les services de sécurité yéménites, lesquels sont impliqués dans des affaires de violations des droits de l'homme dans le pays.
L'incendie a eu lieu aujourd'hui, lundi 18 juillet 2011 au siège de la fondation Alaw, un cabinet d'avocats qui partage ses locaux avec Houd. Les deux organizations offent une assistance juridique aux victimes de violations des droits de l'homme et disposent d'archives très importantes, parmi lesquelles des dossiers d'affaires qu'elles suivent depuis plus de vingt ans. Les cinq mille dossiers ainsi que la bibliothèque spécialisée qui comptait plus de six mille ouvrages de droit sont partis en fumée.

Les défenseurs des droits de l'homme soutiennent que cet incendie profite régime yéménite actuel, qui s'évertue à dissimuler les preuves et les informations relatives aux violations des droits de l'homme dans le pays. Houd est l'une des plus importantes associations qui effectuent un suivi de la situation des droits de l'homme au Yémen. Elle avait fourni des informations sur des cas de violations des droits de l'homme à la délégation de l'ONU, laquelle devait évaluer au cours d'une visite le mois dernier la situation des droits de l'homme dans le pays et enquêter sur les violations des droits de l'homme commises par les autorités yéménites, à l'encontre notamment des manifestants pacifiques.

L'avocat Abderrahman Burman, membre de Houd et d'Alaw souligne "il n'est pas à exclure que cet incendie soit le résultat d'un acte intentionné et volontaire, puisque notre organisation travaille sur l'implication du régime dans des affaires criminelles qu'elle soumet aux mécanismes internationaux. » Burman exclut par ailleurs le fait que l'incendie puisse résulter d'un faux contact électrique, parce qu'il « s'est déclenché alors que l'électricité était parfaitement éteinte dans le local ». L'avocat précise que les services de sécurité ont été informés, et qu'ils enquêtent actuellement pour déterminer les causes de l'incendie, portant ainsi l'entière responsabilité de faire la lumière sur ce qui s'est réellement passé.


Ces dernières années, de nombreux défenseurs des droits de l'homme ont dénoncé les persécutions et les menaces dont ils faisaient l'objet. Certains d'entre eux members de Houd ont été menacés de mort. Tel a été le cas de l'avocat Abderrahman Burman qui a ainsi été victime de nombreux messages de menaces, par téléphone et par courrier électronique. Sa voiture a par ailleurs été criblée de balles il y a quelques années; par chance, il ne se trouvait pas à bord du véhicule.


Mossa Al-Namarani, militant de l'organisation Houd, dénonce quant à lui les coups qu'il a reçus des gardes du parlement alors qu'il participait à un rassemblement pacifique devant le bâtiment de l'Etat. Lors des manifestations de ces derniers mois, Tareq Sarur et Abderrazaq Al Hatami, membres de Houd, dans la province Al-Hadida à l'ouest du pays, ont tous deux rapporté les agressions et les coups reçus des forces gouvernementales. Le premier a été victime de fractures aux mains, et le second a été enlevé avant d'être libéré quelques jours plus tard.


Le 19 juin 2011, les forces de l'armée de l'air, dirigées par le neveu du président Saleh, ont enlevé le journaliste militant Yahya Al-Thalaya, président de l'organisation Houd, alors qu'il se trouvait à un barrage à l'entrée de la capitale Sanaa. Ils l'ont ensuite emmené vers une base de l'armée de l'air yéménite où il a été détenu au secret, et privé de tout contact avec l'extérieur pendant dix jours, avant d'être remis en liberté. Quelques jours plus tard, il a été enlevé pour avoir révélé le crime du transfert de la base militaire à un centre de détention pour les civils, en dehors de tout cadre législatif.


A Aden, au sud du Yémen, les services de sécurité vont jusqu'à menacer de représailles les membres de Houd sur leur proper lieu de travail.

Deux avocats de l'organisation Saleh Assamet et Abdelaziz Alwafi de Sanaa, ont par ailleurs trouvé la mort dans un mystérieux accident de la route alors qu'ils s'apprêtaient à assister au procès du comédien Fahd Al-Qarni dans la ville de Taaz, au centre du pays. Leur voiture avait été sabotée, une technique souvent employé par le régime pour faire disparaître d'éminentes personnalités politiques.


Alkarama tient à exprimer sa solidarité envers ses collègues de Houd et insiste sur la nécessité d'accélérer le déroulement d'une enquête minutieuse et transparente et de juger toutes les personnes impliquées dans cette affaire, de même que dans tous les cas de violence à l'encontre des défenseurs de la loi. Elle rappelle en outre aux autorités yéménites leur obligation de respecter leurs engagements en vertu des traités internationaux qu'elles ont ratifiés.