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Le Comité contre la torture doit examiner lors de sa 43e session, le 3 novembre 2009, le deuxième rapport périodique du Yémen. Alkarama a présenté dans ce cadre une contribution qui met en relief la situation préoccupante des droits humains dans ce pays.


La situation inquiétante des droits de l'homme au Yémen résulte à la fois de facteurs internes liés aux conflits se déroulant au Nord et au Sud du pays, mais aussi à la nature du pouvoir, la pauvreté, aux structures sociales, etc. Il faut toutefois relever les facteurs externes, liés à la position géostratégique du pays et aux pressions exercées dans le cadre de la lutte internationale contre le terrorisme qui ont gravement contribué à la détérioration de la situation politique et en conséquence à celle des droits de l'homme.

Si le Yémen a fait des progrès significatifs sur le plan législatif, dans la pratique, les principes énoncés dans ses différents textes de loi ne sont pas suffisamment respectés et les abus commis par les agents de l'Etat ou des potentats locaux ne sont pas poursuivis et sanctionnés.

La détention arbitraire, au secret, la torture, les conditions pénitentiaires, les procès inéquitables, les exécutions extrajudiciaires, les refoulements vers des pays non respectueux des droits de l'homme, etc. sont courants.

Les services de sécurité ont procédé à de nombreuses campagnes d'arrestations contre des personnes soupçonnées avoir des liens avec Al-Qaida ou d'être impliquées dans des activités " terroristes ". De nombreuses arrestations ont aussi été effectuées lors des rassemblements et manifestations organisés dans le Sud du pays. Tandis que dans le Nord, la région de Saada, où se déroule une guerre contre les Zaïdites, des centaines de personnes civiles, qui ne sont pas impliquées dans le conflit militaire entre les forces armées et le mouvement insurrectionnel houthiste, ont été arrêtées, notamment en représailles, pour contraindre des combattants à se rendre ou pour se venger. Ces opérations, souvent violentes, ne se déroulent pas sans violations graves des lois et des droits des personnes arrêtées.

Le gouvernement nie l'existence de centres de détention au secret. Il est établi pourtant que les différends services, parmi lesquels ceux de la Sécurité politique disposent de lieux de détention, où les personnes arrêtées ou enlevées sont détenues au secret pendant de longues périodes sans contact avec le monde extérieur ou leur famille.

Les personnes détenues par les services de la Sécurité politique sont souvent victimes de tortures et de mauvais traitements. La torture est généralement pratiquée pour soutirer des " aveux " des suspects qui sont utilisés contre eux en cas de procès.

Les témoignages des victimes font état de passages à tabac les yeux bandés, de menottes serrées pendant de longues périodes, de privation d'eau et de nourriture, de sommeil, de suspension prolongée, d'isolement pendant de longues périodes, de menaces de mort etc. Il faut relever que les conditions de détention sont si déplorables qu'elles constituent une forme de mauvais traitement en soi : prisons surpeuplées, manque d'hygiène et surtout de soins.

Dans son rapport, Alkarama propose au Comité contre la torture des recommandations à l'adresse des autorités yéménites parmi lesquelles :
- l'introduction de mesures adéquates pour assurer une véritable indépendance du pouvoir judiciaire ;
- l'interdiction de tous les centres ou lieux de détention qui ne relèvent pas de l'autorité de l'Etat ;
- le contrôle par les autorités civiles de tous les lieux de détention, y compris les établissements de la sécurité politique et de la sécurité nationale et le droit de visite pour le Comité international de la Croix Rouge et à un organisme national indépendant ;
- l'application rigoureuse des dispositions de la loi et des procédures relatives à l'arrestation et à la garde à vue
- la garantie que tous les détenus bénéficient de conditions humaines de détention ;
- le respect du droit des victimes de tortures de déposer plainte et l'assurance d'engager des enquêtes dans tous les cas d'allégations de torture et la poursuite des auteurs et responsables.

Rapport d'Alkarama