Maroc: Soumission du rapport d’Alkarama sur la situation des droits de l’homme en vue du prochain Examen périodique universel

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Le 22 septembre 2016, Alkarama a soumis au Conseil des droits de l’homme (CDH) son rapport sur la situation des droits de l’homme au Maroc en vue de son troisième Examen périodique universel (EPU) prévu en mai 2017. Malgré une évolution tangible des autorités en matière de protection et de promotion des droits de l’homme, certaines pratiques en violation des obligations internationales du Maroc persistent.

Parmi les principales préoccupations exprimées par Alkarama figurent la persistance des pratiques telles que la détention au secret et la torture, notamment dans les cas liés à la lutte contre le terrorisme, les préoccupantes conditions de détention des prisonniers, ainsi que les restrictions à la liberté d’expression et de rassemblement pacifique. Dans son rapport, Alkarama suggère 15 recommandations à adresser au Maroc lors du prochain EPU, en vue d’améliorer le respect des autorités pour les droits de l’homme.

L’EPU consiste en un examen de la situation des droits de l’homme de tous les Etats membres des Nations Unies par le CDH tous les quatre ans. Cet examen prendra la forme d’une discussion entre l’Algérie et les Etats durant lequel ces derniers formuleront des recommandations afin d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays.

Des évolutions apportées par la Constitution de 2011

La Constitution adoptée par référendum en 2011 est plus protectrice des droits de l’homme que la précédente. Par ailleurs, de nombreux chantiers législatifs ont été entrepris, notamment des réformes du Code pénal, du Code de procédure pénale, du Code de la presse ainsi qu’une grande réforme de la justice. Parallèlement, la réforme de la justice militaire met un terme aux poursuites de civils devant les juridictions militaires en temps de paix.

Des violations qui persistent dans le cadre de la lutte antiterroriste

Le droit marocain ne prévoit pas de définition claire, précise and prédictible des actes de terrorisme, comme le requiert le droit international, et les garanties procédurales limitées en matière de terrorisme ne suffisent pas à prévenir la torture et les mauvais traitements. L’accès à un avocat, par exemple, est restreint, puisque seul un entretien, de 30 minutes et sous surveillance, est autorisé. La durée de la garde à vue peut être portée à 12 jours, ce qui va bien au-delà des standards internationaux qui limitent généralement la période légale de la garde à vue à 48 heures.

Ainsi, à la suite des attentats de Casablanca de 2003, des milliers de suspects ont été arrêtés puis détenus incommunicado ou au secret avant d’être condamnés à la suite de procès inéquitables, sur la base d’aveux obtenus sous la torture. Aucune décision de rejuger de manière juste ou de libérer ces personnes n'a été prise suite aux avis du Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire (GTDA) demandant la libération de plusieurs d’entre eux, et de nombreuses personnes sont encore détenues aujourd’hui, telles que Ali Aarass, Abdessamad Bettar, Mohamed Hajib et Rachid Ghribi Laroussi.

Des conditions de détention des prisonniers encore préoccupantes

L’amélioration des conditions de détention reste un défi majeur pour le Maroc. Le recours trop fréquent à la détention préventive a pour conséquence directe le surpeuplement carcéral : en 2014, le taux d’occupation s’élevait ainsi à 157%.

Parallèlement, de nombreux détenus continuent d’être soumis à des mauvais traitements. Par ailleurs, même si la pratique de la torture a nettement reculé, Alkarama a continué à documenter plusieurs cas ces quatre dernières années, tels que celui d’Abdelkader Haloui, militant des droits de l'homme et membre du Centre Marocain des droits de l'homme arrêté le 28 mai 2013 et contraint de signer des aveux sous la torture sans pouvoir prendre connaissance du procès-verbal d’audition. Pour lui comme pour tous, la question de l’impunité demeure : les magistrats ne donnent jamais suite aux allégations portées à leur connaissance et les rares examens médicaux ne sont pas effectués par des médecins indépendants.

Des libertés d’expression et de rassemblement pacifique encore restreintes

Bien qu’une réforme du droit de la presse ait récemment adoptée et supprime les peines privatives de liberté pour les délits de presse, des peines d’emprisonnement subsistent dans le Code pénal pour des faits d’atteinte aux symboles nationaux, à la personne du roi, à la religion ou au drapeau marocain.

Enfin, la création d’associations, syndicats et partis politiques ainsi que l’organisation de manifestations sont strictement encadrées et soumises à des formalités lourdes. La police fait régulièrement un usage excessif et injustifié de la force pour disperser des manifestations pacifiques

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