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Alors que les uns tentent encore d'exorciser les fantômes d'Abou Ghraïb et que d'autres se penchent sur le casse-tête juridique de la fermeture du centre de détention américain de Guantanamo, de nouveaux cas de tortures commises par les forces américaines en Irak continuent de faire surface et d'alimenter la longue liste des cas de tortures pratiquées par les Etats-Unis.

Alkarama a récemment reçu le cas d'un Palestinien réfugié en Irak, Mahmoud Al-Khayat qui, en cinq ans de détention, a été transféré entre huit centres de détention différents. Il a été détenu pendant deux ans par l'armée américaine, années durant lesquelles il a été torturé de nombreuses fois lors de longues sessions.

Mahmoud Hekmat Rashi Al-Khayat a aujourd'hui 50 ans. Originaire du camp de réfugiés d'Al-Badawi à Tripoli, au Liban, il a vécu et travaillé à Karada, à Bagdad pendant plus de 20 ans. Le 15 février 2005, il a été arrêté sans mandat par le bataillon 101 de l'armée américaine à Karada et emmené à l'aéroport international Saddam Hussein qui était alors un centre de détention secret. Là, il a passé une semaine avant d'être transféré au centre d'Abou Ghraïb.

Allégations de tortures

Selon nos sources, M. Al-Khayat a passé cinq mois au total à la prison d'Abou Ghraïb, entre le 22 février 2005 et juillet 2005. Il aurait été torturé pendant deux mois puis placé en détention secrète le temps que les blessures causées par les actes de torture cicatrisent et disparaissent. Certains rapports font état de « techniques coercitives » utilisées par les forces américaines pour extorquer des aveux. Parmi ces techniques, on relève les coups violents, les électrocutions et le spray au poivre dans les yeux. Suite aux tortures qui lui ont été infligées, M. Al-Khayat a eu toutes les dents de devant cassées, une veine du bras éclatée à cause d'un coup de feu et des blessures sur tout le corps. Les aveux qu'il a ét&e! acute; contraint de faire ont été utilisées par la suite pour l'inculper lors de son procès devant un tribunal irakien en 2007.

Depuis 2004, une série d'enquêtes et d'inspections de la prison d'Abou Ghraïb ont eu lieu. En mai 2004, le Comité international de la croix-rouge (CICR) a, suite à la visite du centre de détention, déclaré avoir trouvé des preuves d'une « pratique systématique » de la torture . Dès lors, plusieurs officiers de l'armée américaine ont fait des déclarations publiques affirmant que le principal but d'Abou Ghraïb était d'extraire « autant d'informations (des détenus) que possible ».

D'une prison à l'autre, procès inéquitable

En juillet 2005, l'armée américaine a transféré M. Al-Khayat à la prison de Bouka à Basra. Un an plus tard, en juillet 2006, il a été transféré de nouveau à Abou Ghraïb où il aurait passé deux mois avant d'être transféré à l'aéroport international Saddam Hussein. Après sept mois, il a été remis aux autorités irakiennes le 24 avril 2007 et aurait passé les huit mois suivants à la prison de Badush, à Mossoul.

Alors qu'il était en détention à la prison de Badush, il a été présenté devant un tribunal mais n'a été autorisé à choisir un avocat pour assurer sa défense. M.Al-Khayat a informé le tribunal que ses « aveux » avaient été extorqués sous la torture mais la juridiction n'a pas tenu compte de ses déclarations. Sa condamnation ne s'est pas fait attendre: trois ans d'emprisonnement pour « violation de la loi sur la résidence », en dépit du fait qu'il avait un permis de séjour depuis 1989.

Suite à sa condamnation, il a été transféré à la prison Soussa Castle en novembre 2007 puis à la prison d'Al-Rasafa en avril 2009.

Après avoir purgé sa peine, Mahmoud Al-Khayat a été finalement libéré le 18 octobre 2009 et rapatrié au Liban. Il s'est ensuite installé en Syrie avec son épouse et ses trois enfants.

Lors d'une interview accordée à Jonathan Karl, correspondant pour ABC World News, le 15 décembre 2008, l'ancien vice-président américain Dick Cheney a déclaré: « [concernant la « torture ]... nous ne torturons pas. On ne l'a jamais fait. Ce n'est pas quelque chose que notre admnistration cautionne. »

Mahmoud Al-Khayat pourrait témoigner du contraire...