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Alkarama for Human Rights, 21 octobre 2008

Alkarama dispose de compléments d'informations au sujet de neuf personnes pour lesquelles, en septembre 2007, elle s'était adressée au Rapporteur spécial sur la torture. Elle a informé le Rapporteur spécial le 16 octobre 2008 du fait que ces personnes ont été jugées par un tribunal militaire sur la base d'aveux obtenus sous la torture.

Les personnes citées ci-dessous avaient été arrêtées en mars-avril 2006 et ont été victimes de tortures et de traitements inhumains et dégradants. Elles ont fait l'objet de poursuites pénales devant le tribunal militaire de Beyrouth en dépit du fait qu'elles n'ont pas la qualité de militaire et que les faits qui leur étaient imputés ne constituent pas des infractions à caractère militaire. Le jugement a été rendu le 04 septembre 2008 :

1-Ghassan Sulayman AL SULAIBY, cinq années de travaux forcés
2-Mohamed Ghassan AL SULAIBY, peine couverte par la période de détention
3-Ibrahim Sulayman AL SULAIBY, trois années de travaux forcés
4-Siradj Eddine Mounir, trois années de travaux forcés
5-Sulayman AL SULAIBY, 10 jours d'emprisonnement.
6-Youcef Mounir KOUBROUSLY, trois années de travaux forcés
7-Safy Ibrahim AL ARAB, peine couverte par la période de détention
8-Ahmed Issam RACHID, trois années de travaux forcés
9-Ali Amine KHALED, trois années de travaux forcés

Tous ces hommes avaient été arrêtés sans mandat de justice et sans que les motifs ne leur aient été notifiés. Des membres des services de renseignement militaire dont la plupart se sont présentés à leur domicile en tenue civile les ont emmenés au siège du ministère de la défense à Beyrouth où ils ont été détenus au secret et torturés pendant une période d'une quinzaine de jours avant d'être transférés à la prison civile de Roumié.

Ils n'ont cependant été présentés devant un magistrat militaire que le 15 décembre 2006 pour être inculpés de " tentative de constitution de groupe armé ", de " tentative de commettre des actions terroristes " et de tentative " d'atteinte à la sûreté de l'état ".

Ils ont été privés de soins à la prison de Roumié en dépit des blessures qu'ils ont subies et des séquelles de la torture et de l'état de délabrement physique et moral dans lequel ils se trouvaient après ces deux semaines de sévices.

Le juge d'instruction qui a entendu les prévenus et constaté personnellement les tortures dont ils ont été victimes avait des motifs évidents de croire que des actes de torture avaient été commis ; il n'a cependant jamais pris de mesure ni pour enquêter sur les faits constitutifs de tortures et de mauvais traitements ni pour assurer leur protection en prison où ils ont continué à faire l'objet de cette pratique.

Le juge d'instruction avait aussi refusé de déférer à la demande de désignation d'un expert médical pour examiner les détenus et constater les tortures dont ils ont fait l'objet, au motif "qu'il leur appartenait à eux seuls de rapporter la preuve des tortures qu'ils ont subis !".

Lors du procès, les avocats ont soulevé, en vain, l'incompétence du tribunal militaire à connaître de l'affaire en démontrant les contradictions apparues entre les enquêtes effectuées par les services du ministère de la défense et celle du juge d'instruction.

Dans son jugement, le Tribunal militaire permanent de Beyrouth ne retient pas les accusations initiales alors qu'elles sont à l'origine de son renvoi devant la justice militaire.

Selon les avocats, leurs condamnations ont été basées exclusivement sur les aveux figurant dans les procès verbaux établis lors de l'enquête préliminaire. Le tribunal a refusé d'entendre des témoins à décharge.

Le tribunal militaire ayant en effet catégoriquement refusé de prendre en considération les allégations de torture des accusés ou les affirmations de leurs avocats qui n'ont pas manqué au cours de leurs plaidoiries de soulever formellement la nullité de l'instruction préliminaire pour " vice de contrainte " mais sans résultat.

La condamnation de ces personnes constitue une flagrante violation de l'article 15 de la Convention contre la torture ratifiée par le Liban. Cet article prévoit que toute déclaration dont il est établi qu'elle a été obtenue par la torture ne peut être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure.