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الإرهاب وحقوق الإنسان

Le rapport annuel récemment publié par le Secrétaire général de l’ONU sur le terrorisme et les droits de l’homme a abordé de nombreuses questions soulevées par Alkarama dans sa contribution soumise dans le cadre de ses préoccupations auprès des mécanismes onusiens des droits de l’homme. 

Alkarama avait soumis une brève mais importante contribution portant sur les principales violations des droits humains commises au nom de la « lutte contre le terrorisme », en particulier dans le monde arabe mais également à l’échelle internationale. Elle y dénonçait plusieurs pratiques portant atteinte au cœur des droits fondamentaux, notamment l’usage d’une définition vague du terrorisme dans les législations, l’absence de garanties de procès équitable et de respect des procédures légales ainsi que la tendance croissante à instrumentaliser la qualification « terroriste » pour des situations sans aucun lien avec le terrorisme, telles que l’exercice des libertés civiques ou les questions migratoires. 

Le rapport onusien a ainsi relayé les préoccupations exprimées par Alkarama concernant les législations abusivement larges dans plusieurs États, qui criminalisent des actes insuffisamment définis sous l’étiquette du terrorisme, permettant de sanctionner l’opposition pacifique ou la liberté d’expression. Il souligne qu’un certain nombre de gouvernements utilisent ces lois pour restreindre la liberté de la presse, le droit de manifester ou encore l’activité des défenseurs des droits humains, au mépris des garanties du procès équitable. 

Le Secrétaire général rappelle également que la lutte contre le terrorisme doit impérativement s’inscrire dans le respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Il insiste sur la nécessité d’éviter que des politiques ou mesures sécuritaires ne deviennent des instruments de répression ciblant la société civile et l’opposition pacifique un point central des préoccupations défendues par Alkarama depuis sa fondation. 

Le rapport exprime par ailleurs une inquiétude grandissante quant à la banalisation de l’étiquette « terroriste » pour criminaliser des comportements dépourvus de toute dimension violente, tels que l’expression d’opinions, le travail journalistique ou l’action militante. Cette confusion fragilise la crédibilité de la lutte antiterroriste et entraîne de graves violations des droits civils et politiques. 

Le Secrétaire général appelle donc à une redéfinition juridique précise qui empêche toute extension arbitraire du concept. Insistant sur l’importance d’une définition rigoureuse du terrorisme, le rapport affirme clairement qu’elle ne doit pas englober l’opposition ou la critique pacifique des gouvernements. 

Il analyse également le lien complexe entre lutte contre le terrorisme et protection des droits humains. Nombre d’États, en particulier dans le monde arabe, ont adopté des dispositifs sécuritaires invoquant la sûreté nationale, alors même qu’ils contreviennent aux normes internationales. Sur la base d’études de terrain et de documents onusiens, le rapport démontre comment ces législations d’exception sont utilisées pour restreindre les libertés et bâillonner les voix indépendantes. 

Contribution d'Alkarama

Alkarama avait soumis sa contribution en date du 14 avril 2025, dans le cadre de l’élaboration du rapport du Secrétaire général relatif à la mise en œuvre de la résolution 78/210. Ce document, qui sera présenté au Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale, s’inscrit dans une initiative internationale plus large visant à documenter les violations commises sous couvert de lutte antiterroriste. 

La résolution 78/210, adoptée par l’Assemblée générale, rappelle aux États leur obligation de respecter les droits humains dans le cadre de leurs efforts antiterroristes. Elle charge le Secrétaire général d’évaluer la conformité des législations et pratiques nationales aux normes internationales en s’appuyant notamment sur les contributions des organisations de la société civile telles qu’Alkarama. 

Dans sa contribution, Alkarama dénonce les failles structurelles des lois antiterroristes et leur incompatibilité avec les standards internationaux, particulièrement dans le monde arabe où l’organisation œuvre depuis 2004. 

Elle souligne que ces lois, souvent rédigées en termes vagues ou ambigus, servent à criminaliser l’opposition pacifique et à renforcer la répression étatique. La contribution s’appuie sur des exemples emblématiques, tels que l’article 87 bis du Code pénal algérien, ou encore les centres de « réhabilitation » en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, assimilables à des lieux de détention extrajudiciaire. 

Elle met aussi en lumière les violations invisibles liées à la surveillance numérique et au contrôle des flux financiers, imposées au nom de la sécurité nationale. Dans des pays comme la Jordanie, les Émirats arabes unis ou même la France, ces mesures entravent profondément le droit à la vie privée, la liberté d’expression et la liberté d’association. L’affaire du chercheur et politologue François Burgat poursuivi pour « apologie du terrorisme » sur la base d’un extrait décontextualisé illustre le danger que représentent ces incriminations floues, où la frontière entre analyse critique et incitation à la violence devient dangereusement ténue. 

Concernant la question des combattants étrangers, également abordée dans le rapport du Secrétaire général, Alkarama a rappelé l’exemple symbolique des anciens détenus de Guantánamo, où perdurent détention sans procès, torture et absence de garanties juridiques. Elle souligne aussi le transfert de détenus vers certains pays arabes notamment les Émirats arabes unis sans garanties suffisantes, les exposant à de nouvelles violations et à l’impossibilité d’une réinsertion une réalité évoquée globalement dans le rapport, sans toutefois détailler les cas. 

Malgré les appels répétés des ONG et de la société civile, de nombreux États continuent de refuser toute réforme de leur arsenal législatif antiterroriste. Cette position, justifiée par une rhétorique sécuritaire inflexible, traduit une volonté politique de maintenir des mesures exceptionnelles en temps de paix sous prétexte de lutte antiterroriste. 

Enfin, Alkarama se félicite que l’équipe du Secrétaire général ait largement intégré ses recommandations et observations et soutient pleinement son appel renouvelé à des réformes juridiques profondes, au renforcement des droits civils et politiques, à une véritable reddition des comptes sur la scène internationale ainsi qu’à une stratégie de lutte contre le terrorisme reposant sur l’État de droit, la transparence et le respect des droits de l’homme.