Alkarama s'est adressée au Rapporteur spécial sur la torture, le priant d'intervenir auprès des autorités jordaniennes afin que celles-ci diligentent une enquête exhaustive et impartiale sur les actes de tortures que M. Talafha a subi, conformément à l’article 12 de la Convention contre la Torture, d’en identifier les auteurs, de les traduire en justice et de les condamner le cas échéant.
Le 1er mars 2010, M. Sayed Mahmoud Hamed TALAFHA, 29 ans, maçon et père de deux enfants a été arrêté à son domicile, en présence de sa femme enceinte et sa fille âgé de deux ans, par des agents du service d’enquêtes criminelles d’Irbid sans qu'un motif ni mandat de justice ne lui ait été présentés. Il a été emmené, les mains attachées, au siège de la direction des enquêtes criminelles où il a été violemment battu la même nuit sur toutes les parties du corps, menotté et pendu par les poignets au dos d'une porte. L'un des agents l'a frappé sur la jambe droite qui avait été opérée à la suite d’un accident antérieur et comportait des broches, tandis qu’un autre agent lui a percé le poignet droit avec une perceuse occasionnant la perforation de ses veines.
Compte tenu de son état déplorable, M. Talafha a été transporté en urgence à l'hôpital gouvernemental de la princesse Basma où les médecins l’ont opéré le 2 mars 2010. Le même jour, les parents de M. Talafha lui ont rendu visite à l’hôpital et l’ont trouvé en présence de l’un de ses tortionnaires, , qui a déclaré aux parents que ce qui était arrivé à leur fils « n’était qu’un début ».
Le 2 mars 2010, M. Talafha a été effectivement transféré de l’hôpital, malgré son état de santé, vers les locaux du service d’enquêtes criminelles où il a été détenu encore pendant cinq jours avec des dizaines de personnes dans une cellule de quelques mètres carrés et sans contact avec le monde extérieur.
M. Talafha a été privé de rencontrer son avocat et a été obligé, durant sa garde à vue, de signer des aveux sous la torture selon lesquels il aurait commis un vol.
Le 14 mars 2010, il a été présenté devant le procureur général du tribunal de Ben Obeid à Irbid, qui a ordonné qu’il soit soumis à un examen médical ainsi que sa mise en détention à la prison Qafqafa à Irbid où il est actuellement détenu dans l’attente de son jugement.
La famille de M. Talafha a tenté, en vain, de porter plainte pour torture devant le procureur général chargé du contrôle de la police lequel a refusé de recevoir leur plainte au motif qu’il fallait attendre le rapport du médecin légiste.
La famille de M. Talafha craint cependant qu’il ne s’agisse que d’une manœuvre destinée à perdre du temps de sorte que les traces de tortures infligées à leur fils ne disparaissent.
Il apparaît ainsi évident que M. Talafha a été victime de violations graves de ses droits les plus fondamentaux en raison des graves actes de torture et autres mauvais traitements qu’il a subis de la part des agents des services d’enquêtes criminelles d’Irbid, en violation de l’article 2 de la Convention contre la torture ratifiée par la Jordanie.
La Jordanie a ratifié le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques le 28 mai 1975. Elle est également partie de la Convention contre la Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants depuis le 13 novembre 1991.
Le comité contre la torture va examiner le rapport périodique de la Jordanie lors de sa 44e session qui se tiendra du 26 avril au 14 mai 2010.