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« Il arrive souvent que... nos oreilles soient offensées en apprenant ce que disent certains qui, bien qu'enflammés de zèle religieux, manquent de justesse de jugement et de pondération dans leur façon de voir les choses. Dans la situation actuelle de la société, ils ne voient que ruines et calamités; ils ont coutume de dire que notre époque a profondément empiré par rapport aux siècles passés ; ils se conduisent comme si l'histoire, qui est maîtresse de vie, n'avait rien à leur apprendre... Il nous semble nécessaire de dire notre complet désaccord avec ces prophètes de malheur, qui annoncent toujours des catastrophes, comme si le monde était près de sa fin. » Pape Jean XXIII

« Tous le peuples sont bons. Chacun mérite le respect et l'admiration. J'ai vu souffrir les hommes. Tous ont besoin d'amour. S'ils sont méchants, c'est peut-être qu'ils n'ont pas rencontré le véritable amour... Je sais aussi qu'il y a des forces sombres, démoniaques; qu'elles s'emparent parfois des hommes ou des peuples. Mais l'amour de Dieu est plus fort que l'enfer. Dans son amour nous trouvons le courage d'aimer les hommes... » Patriarche Athënagoras

Chers amis,

Je suis heureux de votre choix par lequel vous honorez aujourd'hui Maitre Abdennour Ali-Yahia, un ami et un véritable doyen dans la défense des droits de l'homme en Algérie et ailleurs.

Vous savez bien combien son pays nous tiens à cœur, tout comme sa paix, sa prospérité, sa sérénité. Dans la quête de ces valeurs, nous avons rencontré Maitre Ali-Yahia. J'ose dire qu'on ne s'est plus jamais quittés.

Lorsque je l'ai connu il avait déjà une longue expérience derrière lui, soit celle de l'époque de la lutte pour l'indépendance et pour une Algérie nouvelle, soit ensuite, dans son inlassable bataille pour la défense des droits de l'homme. A cause de ses choix, il avait déjà payé lourdement, par la prison et la déportation.

Il pouvait donc se sentir un homme déjà satisfait de son parcours. Ou alors il pouvait être un homme résigné à cause des difficultés d'un combat sans fin.

Rien de tout cela. En face de moi, il n'y avait ni un brisé ni un comblé, mais un véritable combattant de l'humain, qui gardait toute la force de l'esprit de son jeune âge enrichie par une mure et profonde expérience.

En vérité, quand on est avec lui on ne sait pas si on doit admirer sa vitalité ou respecter sa sagesse, suivre son ardeur enflammée ou apprécier sa patience géologique. Il faut toujours faire les deux.

Vous le savez, ensemble nous avons essayé de faire sortir le pays de la crise violente dans laquelle il était tombé, en utilisant les armes du dialogue, du débat, du compromis politique. Cette tentative honnête et noble, a été nommée à l'époque une « offre de paix ». Vous en connaissez les péripéties.

Ce que je garde dans ma mémoire, et que je partage avec vous ce soir, c'est la force humaine et - j'ajoute - spirituelle de Maitre Ali-Yahia, qui a toujours constitué, pour ceux qui étaient à ses côtés, une raison supplémentaire mais incontournable, de ce que j'appellerais une vigueur douce et une fermeté compatissante.

En effet, Maitre Ali-Yahia a pris conscience très tôt que la guerre et la violence sont « la mère de toutes les pauvretés » et par conséquent de la haine. Il leur a préféré la parole et la confiance dans l'humain, même dans les temps difficiles et obscurs, lorsque les hommes deviennent des ennemis. Il a toujours su résister à l'esprit des temps, sans sombrer dans la résignation, la peur ou le mépris de l'autre, qui semblent être les grandes maladies de notre temps. Il est en ce sens un exemple de ce que signifie rester « un homme » même lorsque il n'y a plus d'hommes, lorsque domine l'inhumain.

Sa capacité à imaginer une société, non seulement plus juste, mais où il est possible de vivre ensemble, hommes et femmes de cultures, religions, confessions, idéologies, idées et approches différentes, est un exemple pour nous tous.

Son action, nous le savons, n'a pas été sans effets mais elle a produit des fruits en plusieurs directions. Elle a surtout parlé à beaucoup de cœurs. Nous en sommes conscients : les seules révolutions créatrices de l'histoire sont nées de la transformation des cœurs.

Un sage chrétien qui aimait l'Orient, René Voillaume, a écrit une fois : « Peut-être nous allons rentrer dans une époque de l'histoire du genre humain qui sera le temps de la compassion dans l'impuissance de trouver des solutions aux problèmes posés. Il sera alors plus que jamais nécessaire de nous offrir en intercession, en communion [...] pour supplier la miséricorde de Dieu de se répandre sur tous les hommes ».

C'est par ces mots que je vous félicite de votre choix auquel j'ajoute mon adresse de respectueuse affection pour Maitre Ali-Yahia, un homme rare, un homme de compassion même aux temps de l'impuissance, un homme vrai parce qu'il a intercédé pour les autres.
Sa leçon c'est qu'il nous oblige encore et encore à croire en l'homme et à l'avenir.