À l’occasion de la Journée internationale pour mettre fin à l’impunité des crimes commis contre les journalistes, Alkarama renouvelle son appel à la communauté internationale pour que cessent les violations et l’impunité persistante dont sont victimes les professionnels des médias. Alkarama alerte sur des tendances mondiales inquiétantes et sur la transformation de la bande de Gaza en l’un des lieux les plus meurtriers pour les journalistes dans l’histoire contemporaine.
Alkarama rappelle le message du Secrétaire général des Nations Unies, qui souligne que les dangers croissants auxquels sont confrontés les journalistes — intimidation, harcèlement judiciaire, menaces, voire assassinats — imposent un engagement ferme pour mettre fin à l’impunité et garantir la protection du journalisme, pilier essentiel de la démocratie et du droit du public à l’information.
Le Secrétaire général a exhorté les États à réagir face à la multiplication des attaques, du harcèlement juridique et des menaces numériques contre les journalistes. De son côté, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a rappelé que les journalistes sont des civils protégés en toutes circonstances, et que les attaques visant les professionnels ou leurs médias peuvent constituer des crimes de guerre.
Les données publiées par l’UNESCO restent alarmantes : depuis 2006, 85 % des assassinats de journalistes n’ont donné lieu à aucune poursuite. Rien qu’en 2024, au moins 68 journalistes et collaborateurs des médias ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions, dont plus de 60 % dans des contextes de conflit armé — un record en plus de dix ans. Ces chiffres traduisent un décalage profond entre les engagements internationaux et la réalité du terrain.
Gaza, un test accablant pour le droit international
Depuis le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est devenue l’endroit le plus dangereux au monde pour exercer le journalisme. Le 6 juin 2025, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a confirmé la mort de 227 journalistes palestiniens depuis le début du conflit, réaffirmant leur statut de civils protégés par le droit international humanitaire.
Les experts des Nations Unies ont, à de multiples reprises, réclamé des enquêtes indépendantes et crédibles sur ces assassinats et sur les attaques visant les journalistes à Gaza, tout en dénonçant les politiques de censure et de répression. Des estimations récentes, émanant de sources journalistiques et d’organisations de défense des droits humains, laissent entendre que le bilan réel serait bien supérieur.
Ce schéma récurrent — meurtres durant les reportages, frappes sur les domiciles et les sièges des médias, arrestations arbitraires — constitue des violations graves susceptibles d’être qualifiées de crimes de guerre.
Les organisations de défense de la liberté de la presse signalent que les journalistes palestiniens ont subi des menaces, des violences, des détentions arbitraires et des actes de torture. Les restrictions imposées à la presse étrangère ont accru la vulnérabilité des équipes locales, contraintes d’assurer seules la couverture du conflit. Les données cumulées démontrent qu’il s’agit du conflit le plus meurtrier pour les journalistes jamais enregistré, une situation en parfaite cohérence avec la gravité des faits documentés.
Par ailleurs, le recours à la famine comme arme de guerre, qui a touché les journalistes de Gaza au même titre que la population civile, constitue une violation flagrante du droit international humanitaire.
Enjeux juridiques et implications pour les droits humains
Les violations systématiques et répétées — assassinats, ciblages délibérés, détentions, tortures — lorsqu’elles sont démontrées comme étendues ou systématiques, comme dans le cas du comportement d'Israël à Gaza, relèvent de la catégorie des crimes internationaux les plus graves et entraînent à la fois une responsabilité pénale individuelle et une responsabilité étatique. L’entrave à l’accès à une information indépendante aggrave encore les souffrances humaines et l’impact du conflit.
Le droit international humanitaire impose des obligations strictes : les journalistes doivent être respectés et protégés en tant que civils. Les Nations Unies réaffirment sans cesse cette norme et condamnent toute atteinte à celle-ci. L’impunité alimente la répétition des crimes : selon l’UNESCO, l’absence de poursuites, constatée dans 85 % des cas, favorise la persistence de la violence contre les médias et sape la liberté d’expression comme le droit à l’information.
Alkarama appelle donc à l’ouverture d’enquêtes pénales indépendantes et efficaces sur l’ensemble des meurtres et attaques contre les journalistes à Gaza et ailleurs, à une coopération pleine et entière des États avec les mécanismes onusiens et à l’accès sans entrave des experts aux lieux des violations.
S’agissant des gouvernements arabes, Alkarama les invite à adopter et mettre en œuvre des plans nationaux de protection des journalistes, intégrant des mécanismes d’alerte rapide, des protocoles de sécurité en période de conflit, un accompagnement psychologique ainsi que des dispositifs de refuge sécurisé, conformément au Plan d’action des Nations Unies sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité.
Pour combattre l’impunité, Alkarama plaide pour le renforcement des juridictions nationales et internationales, y compris l’application du principe de compétence universelle, afin que les auteurs de crimes graves contre les journalistes répondent de leurs actes.
Alkarama demande également la fin des campagnes de dénigrement et d’incitation à la haine qui précèdent ou accompagnent les agressions et la criminalisation des menaces, du harcèlement numérique et du harcèlement judiciaire visant les professionnels des médias.
Activisme d’Alkarama
Alkarama poursuit le suivi de nombreuses affaires de violations commises contre des journalistes dans le monde arabe.
En collaboration avec les mécanismes et procédures spéciales des Nations Unies, elle œuvre à renforcer la responsabilité et la prévention, notamment par la surveillance des violations systématiques en temps de conflit, le dépôt de plaintes internationales et le soutien aux victimes et à leurs familles.