EGYPTE : Le Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture saisie du cas de l’ancien gouverneur Dr. Hossam Abouelezz

حسام أبو العز مع أحد أحفاده

Le 16 février 2022, Alkarama s’est adressée au Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture concernant le cas de l’ancien gouverneur de Qalyubia, arrêté le 17 septembre 2013 par la police et détenu depuis totalement coupé du monde extérieur.

Arrestation et disparition forcée de M. Abouelezz

M. Abouelezz était professeur d'université dans l'une des écoles d'ingénieurs du Caire. Après l'élection de Mohamed Morsi à la présidence, il a été nommé gouverneur de Qalyubia jusqu'au coup d'État militaire qui a évincé le président démocratiquement élu Mohamed Morsi et l'arrivée au pouvoir du général Abdel Fattah el Sisi. Après le coup d'État, le Dr. Abouelezz a refusé de quitter son pays mais vivait dans la crainte d’un assassinat ou d’une arrestation arbitraire par les services de sécurité

Le 17 septembre 2013, alors qu'il se trouvait en voiture avec un ami dans le district de Hadaeq Al Qubbah, au Caire, le Dr. Abouelezz a été arrêté à un barrage de police. Selon des témoins, lorsque les agents ont vérifié son identité, l’un d’eux a passé un appel téléphonique suite auquel il a immédiatement été arrêté et emmené, ainsi que son ami, vers une destination inconnue. Aucune raison ne lui a été annoncée pour justifier cette arrestation.

Le Dr. Abouelezz a ensuite été maintenu en état de disparition forcée par les forces de sécurité de l'État pendant deux mois. Pendant cette période, sa famille et son avocat ont demandé, en vain, aux autorités d'être informés de son sort et du lieu où il se trouvait, ainsi que des raisons de son arrestation. Au bout de deux mois, sa famille a été informée qu'il se trouvait dans la prison de haute sécurité de Tora, connue sous le nom de « prison du Scorpion », avec des centaines d’autres détenus politiques vivant dans des conditions inhumaines. Il y est toujours détenu dans un cachot sans lumière et sans aération totalement coupé du monde extérieur depuis aujourd’hui huit années.

Condamnation à l’issue d’un procès inéquitable

Le 20 septembre 2013, le Dr Abouelezz s’est vu notifié par le parquet de la Sureté de l’État plusieurs chefs d’accusations parmi lesquels le « meurtre avec préméditation » dans l’affaire de la dispersion du sit-in pacifique de Rabaa qui a fait l’objet de l'un des procès de masse les plus importants après le coup d’état.

« La dispersion du sit-in de Rabaa » fait référence au sit-in de milliers de manifestants pro-Frères musulmans sur la place Rabaa Al Adawya au Caire qui s'est déroulé du 21 juin au 14 août 2013 et qui a fait l’objet d’une attaque des militaires qui ont tiré à balles réelles sur les manifestants tuant plus de 1000 personnes et en blessant des milliers d’autres.

Aucun avocat n'a été autorisé à l'assister au cours de son procès et aucun fait précis en relation avec les accusations dont il faisait l’objet n’a été établi sinon qu’il faisait partie du mouvement des frères musulmans et qu’il exerçait une responsabilité administrative et politique de par sa fonction.

Le Dr. Abouelezz a donc été condamné à la prison à vie dans un procès de masse unanimement qualifié d'inéquitable, y compris par les experts du Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies.

Le Dr. Abouellez n’a jamais pu consulter son dossier pénal pour préparer sa défense ni consulter ou communiquer avec son avocat avant, pendant ou après le procès au cours duquel les accusés se trouvaient dans des cages en verre insonorisées sans pouvoir même intervenir pour s'adresser au tribunal. Il n’a pu recevoir qu’une seule visite de son épouse depuis son arrestation il y a huit ans.

Des conditions de détention synonyme de torture

Le Dr. Abouelezz est détenu aujourd’hui depuis huit ans dans la prison de haute sécurité de Tora à l'isolement dans une petite cellule sans lumière naturelle. Il est privé de toute forme de communication avec le monde extérieur, y compris avec sa famille qui n'est même pas autorisée à l'appeler. Malgré les nombreuses demandes déposées par la famille et son avocat auprès des autorités aucun droit de visite ou de communiquer avec lui par téléphone ne leur a été accordé.

Depuis huit années, les seules nouvelles parvenues à son épouse ont été celles communiquées par l’intermédiaire des familles de ses voisins de cellules qui ont reçus des visites de leurs proches.

C'est ainsi que son épouse a été récemment informée de la grave détérioration de son état de santé et de sa privation d’accès aux soins et à tout traitement médical pour son diabète et les autres pathologies dont il souffre ; de nombreux détenus politiques dans les prisons égyptiennes sont morts en raison de l’absence de toute prise en charge médicale depuis le coup d’état militaire dans un silence préoccupant de la communauté internationale.

Le Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture saisie par Alkarama

C’est dans ces circonstances qu’Alkarama s’est adressée, le 16 février 2022, au Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture afin d’appeler les autorités égyptiennes à libérer le Dr. Abouellez et à lui assurer en urgence une prise en charge médicale. Alkarama a régulièrement attiré l’attention des procédures spéciales des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en Egypte et en particulier sur les conditions cruelles et inhumaines de détention des prisonniers politiques.