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Tidjani AMRI

Le 7 novembre 2024, Alkarama a soumis au Comité des droits de l'homme des Nations Unies (CdH) le cas de M. Tidjani AMRI, journaliste d'investigation, enlevé le 27 mai à Tébessa et emmené au centre de Ben-Aknoun où il a été torturé jusqu’au 4 juin 2019 par les militaires. 

Ciblé pour son engagement, notamment ses dénonciations de la corruption des hauts responsables algériens et sa participation à des manifestations populaires pacifiques, M. AMRI a été victime d'une disparition forcée. 

Un défenseur des droits de l’homme 

Défenseur des droits de l’homme, M. AMRI a été membre de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH) et de l’Association pour la Promotion de la Citoyenneté et des Droits de l’Homme. 

En tant que journaliste, M. AMRI a révélé des scandales de corruption impliquant des personnalités politiques et militaires de haut rang ce qui lui a valu des représailles. 

En mai 2019, alors qu’il revenait d’un séjour à l’étranger, M. AMRI a été arrêté une première fois à la frontière algéro-tunisienne, détenu pendant cinq jours, avant d’être placé sous contrôle judiciaire. 

M. AMRI a par la suite été arrêté arbitrairement à plusieurs reprises en raison de sa couverture des manifestations populaires du « Hirak » et pour y avoir participé en exhibant des pancartes montrant des personnalités civiles et militaires notoirement impliquées dans des affaires de corruption. 

Disparu à la suite de son enlèvement 

Le 27 mai 2019, alors qu’il se dirigeait, avec un ami, en voiture vers la station-service située sur la route d'Annaba (nord-est de l’Algérie), il a été enlevé sur la voie publique par plusieurs hommes armés et en civils. 

M. AMRI a d'abord été emmené à la caserne de Tébessa avant d'être transféré au centre de détention « Antar » de Ben-Aknoun à Alger, un lieu tristement réputé pour ses pratiques de torture et où plusieurs milliers d’algériens ont disparus dans les années 90 et qui continue encore aujourd’hui à être utilisé pour détenir des opposants politiques. Il y est resté jusqu'au 4 juin 2019, date à laquelle il a été relâché sans qu'aucune procédure judiciaire ne soit engagée. 

Pendant sa détention au centre de Ben-Aknoun, M. AMRI a été isolé du monde extérieur et soumis à des actes de torture. Il y a reçu la visite des responsables politiques et militaires qu'il avait dénoncés pour leur implication dans des affaires de corruption et d’abus de pouvoir. Ces personnes l'ont menacé de mort et participé à sa torture en représailles de ses révélations sur leurs agissements. 

Au cours de son audition, M. AMRI a été interrogé sur ses publications et sur sa participation aux manifestations populaires du Hirak. Il a également été interrogé sur ses prétendus liens avec des mouvements d’opposition à l’étranger, ainsi que sur la provenance de ses informations. 

Le 4 juin 2019, M. AMRI a emmené hors de la caserne dans un véhicule banalisé et abandonné sur la route quelques centaines de mètres plus loin dans un état lamentable après avoir été averti qu'il ne pourrait pas s'en sortir aussi facilement la prochaine fois. 

Malgré ses blessures, M. AMRI a tenté de s'éloigner à pied, avant d’être repéré par un véhicule de police. Après avoir expliqué aux policiers les causes de son état, ceux-ci l’ont directement conduit à la gare routière et embarqué dans un bus à destination de Tébessa où il a été hospitalisé à son arrivée. 

Contraint de quitter l’Algérie 

Le 10 décembre 2021, M. AMRI a été convoqué au tribunal militaire de Blida, à Alger, où il a été informé qu’il faisait l’objet de poursuites sous prétexte d’affiliation à un mouvement terroriste, en allusion au mouvement Rachad

Par crainte d’être condamné à une lourde peine à l’issue d’un procès inéquitable, M. AMRI a clandestinement fui l’Algérie pour la Suisse le 31 décembre 2021. 

Contacté en Suisse par les services de renseignements algériens 

Depuis son arrivée en Suisse, il a exprimé des craintes que sa famille restée en Algérie ne puisse subir des représailles après que celle-ci ait reçu des menaces. 

Dans le courant de l’année 2023, M. AMRI a été contacté par les services de renseignements algériens lesquels lui ont proposé un « retour sécurisé en Algérie » s’il renonçait à ses activités sur les réseaux sociaux. 

Alkarama saisit Comité des droits de l’homme de l’ONU 

Le 10 juin 2019, M. AMRI a déposé une plainte auprès du procureur de Tébessa concernant l’enlèvement et les tortures qu'il a subis, mais aucune enquête n'a été ouverte. Malgré la régularité de la procédure et l’obligation légale des autorités judiciaires d’ouvrir une enquête, celles-ci n'ont pas réagi, laissant M. AMRI sans possibilité d’obtenir justice dans son pays, raison pour laquelle il a décidé de faire appel à Alkarama. 

Le 7 novembre 2024, Alkarama a donc déposé en son nom une plainte auprès du Comité des droits de l'homme des Nations Unies après avoir documenté l'ensemble des violations des droits fondamentaux de la victime, incluant sa privation arbitraire de liberté, sa disparition forcée et les tortures subies pour avoir exercé sa liberté d’expression et d’association. 

Alkarama a également dénoncé les manquements répétés de l'État algérien à respecter ses engagements internationaux, notamment ceux consacrés dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel l'Algérie est partie depuis 1989. 

Alkarama a appelé le Comité des droits de l'homme à relever les violations commises à l’égard de M. AMRI et a demandé à ce que les autorités algériennes s’engagent à mener une enquête, à poursuivre les responsables civils et militaires de ces exactions et à réparer les préjudices subis par M. AMRI.