Mauritanie: Des peines d'emprisonnement de 3 à 15 ans pour les activistes antiesclavagistes de l'IRA

Des peines d'emprisonnement de 3 à 15 ans pour les activistes antiesclavagistes de l'IRA

Le 5 octobre 2016, Alkarama a soumis au Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l'homme (SR HRD) une communication concernant la condamnation de 13 militants de l'ONG mauritanienne de lutte contre l'esclavage, l'Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), MM. Amadou Tidjane Diop, Balla Touré, Hamady Lehbouss, Ahmed Amarvall, Khattry M'Bareck, Mohamed Daty, Jemal Beylil, Ousmane Anne, Ousmane , Abdallahi Matallah Seck, Moussa Biram, Abdallahi Abou Diop et Mohamed Jaroullah.

Entre le 30 juin et le 9 juillet 2016, sous le prétexte d'avoir participé à des affrontements survenus le 29 juin lors de l'expulsion des habitants d'un bidonville près de Nouakchott, ces militants – pourtant absents du rassemblement – avaient fait l'objet d'une vague d'arrestations. Après plusieurs jours de détention au secret, certains d'entre eux portaient des traces visibles d'actes de torture physiques perpétrés dans le but de leur arracher des aveux sur leur prétendue participation aux affrontements. Le parquet les a ensuite formellement accusés d' « attroupement armé », « violences à l'égard d'agents de la force publique », « rébellion » et « appartenance à une organisation non enregistrée ».

Lors de l'ouverture du procès devant la Cour criminelle de Nouakchott le 3 août, les personnes venues assister au procès ont été violemment repoussées par la police. Le 10 août, durant l'audience, les avocats de la défense ont été insultés et intimidés par un officier de police, privés du droit de prendre la parole depuis l'estrade ou de s'approcher du président et n'ont pu, par conséquent, ni contester les éléments à charge, ni transmettre aux magistrats les pièces à l'appui de leurs arguments. Le tribunal n'a en outre donné aucune suite aux allégations de torture portées à sa connaissance. Les prévenus ont donc demandé au collectif d'avocats les défendant de se retirer, en signe de protestation face à ces nombreuses irrégularités.

Le 18 août 2016, les activistes d'IRA Mauritanie ont été condamnés à de lourdes peines de prison, allant de 3 à 15 ans, sur la seule base d'aveux obtenus sous la torture et en dépit des allégations de torture soumises aux juges.

Jusqu'alors détenus dans des conditions inhumaines à la maison d'arrêt de Dar Naïm, ils ont été transférés le 28 septembre 2016 vers la prison de Zouerate, à 766 km de Nouakchott, alors que la Cour suprême avait décidé de leur transfert vers Nouadhibou, plus accessible à leurs avocats et à leurs familles. Par ailleurs, depuis le début de leur détention, leur droit d'accéder à des soins médicaux a été régulièrement bafoué, alors même que certains souffrent de pathologies graves. Alkarama craint que cette nouvelle mesure n'ait pour but de les isoler davantage et de les empêcher de préparer correctement leur défense pour le procès en appel qui devrait débuter aux alentours du 20 octobre prochain.

Alkarama appelle une nouvelle fois les autorités mauritaniennes à libérer immédiatement les militants d'IRA, à cesser tout acte de persécution envers ceux qui appellent au respect des libertés civiles et politiques et à veiller à ce que de telles violations ne se reproduisent plus.

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