Liban: Affaire « Nahr Al Bared » : l’interminable injustice

Nahr Al Bared est un camp de réfugiés palestiniens situé au nord du Liban. De mai à septembre 2007, il fût le théâtre d’affrontements entre les forces régulières libanaises et le groupe armé radical Fatah Al Islam, au cours desquels environ 300 civils ont été tués et plusieurs milliers d’autres déplacés. Dans le cadre d’une opération de grande ampleur, des centaines de personnes avaient ensuite été arrêtées et 87 restent à ce jour détenues ou poursuivies en raison de leurs liens supposés avec ce groupe.

Dès 2011 Alkarama avait alerté les instances onusiennes des risques importants de violation du droit fondamental à un procès équitable qui pesait sur ces 87 personnes. Déjà la décision en 2007 du Conseil des Ministres de les faire comparaître devant le Conseil judiciaire, un tribunal d’exception ne présentant pas de garanties d’indépendance suffisantes vis-à-vis de l’exécutif selon l’ONU, faisait craindre une justice partiale. Il est en effet fréquent que les règles internationales relatives au procès équitable n’y soient pas appliquées, d’autant que ses décisions ne sont pas susceptibles d’appel.

De plus, il est établi que les personnes détenues dans le cadre de cette affaire ont fait l’objet d’actes de torture durant leurs détentions dans les locaux du Ministère de la défense ou encore lors de leur transfert au Tribunal Militaire. Ces actes visaient à obtenir des aveux sur leur appartenance et liens allégués avec le groupe Fatah Al Islam en vue de les utiliser durant leurs procès.

Ce n’est qu’en 2013, six ans après leur arrestation, que certaines de ces personnes ont été déférées pour la première fois devant le Conseil judiciaire. Seules 12 d’entre elles cependant ont, en mai 2014, été jugées et condamnées à des peines allant de deux à 15 ans d’emprisonnement sur la base de procès verbaux contenant des aveux obtenus sous la torture. A ce jour, 61 personnes restent dans l’attente de leur procès en détention.

Il semble évident compte tenu de ces éléments que les accusés de Nahr Al Bared ont vu leur droit fondamental à un procès équitable bafoué. C’est pourquoi Alkarama a de nouveau saisi les instances des Nations Unies compétentes afin que soit demandé aux autorités libanaises de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à cette situation injuste.