Algérie: 12 ans après l'assassinat de Lounès Matoub, Malik Medjnoune, entame une grève de la faim pour clamer son innocence

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Le 25 juin 1998, Lounès Matoub, un des chanteurs algériens les plus engagés, est tué par balles par un groupe armé non identifié. Détenu depuis septembre 1999, Malik Medjnoune est accusé de complicité dans cet assassinat, ce qu'il a toujours nié. Malik qu'on surnommait le « petit Matoub » tant il appréciait ses chansons est emprisonné depuis sans jugement. Il a entamé aujourd'hui une nouvelle grève de la faim pour qu'enfin son appel à être jugé soit entendu.

Du fond de sa cellule, Malik Medjnoune tient aujourd'hui à saluer la mémoire de Lounès Matoub malgré le sort qui lui est réservé depuis plus de 10 ans ; il continue à clamer son innocence et déclare qu'en empêchant d'établir la vérité et la justice sur ce crime, Lounès Matoub est assassiné une seconde fois.

Enlevé près de son domicile à Tizi-Ouzou le 28 septembre 1999 par des agents du Département des renseignements et de la sécurité (DRS), Malik Medjnoune a été détenu au secret à la caserne « Antar » de Ben Aknoun (Alger) relevant du DRS. Durant ces huit mois de détention, il a été sauvagement torturé selon les techniques habituellement utilisées par ce service (méthode du chiffon, électricité. etc.). Présenté le 05 mai 2001 devant le tribunal criminel de Tizi-Ouzou, son affaire a été renvoyée sine die. Depuis, il attend toujours d'être présenté devant un tribunal pour établir son innocence.

Nous rappelons que la situation de M. Malik Medjnoune avait été soumise au Comité des droits de l'homme de l'ONU le 11 juin 2004 qui avait statué sur sa plainte le 14 juillet 2006. Aux termes de ses constatations, le Comité onusien avait fait droit à toutes ses demandes et enjoint aux autorités algériennes :

« D'amener Malik Medjnoune immédiatement devant un juge pour répondre des chefs d'accusation ou le remettre en liberté, de mener une enquête approfondie et diligente sur sa détention au secret et les traitements qu'il a subis depuis son enlèvement le 28 septembre 1999 et d'engager des poursuites pénales contre les personnes responsables de ces violations ».

Au cours de la procédure, le gouvernement algérien avait informé le Comité des droits de l'homme par lettre du 28 décembre 2004 « que l'affaire devait être soumise incessamment au tribunal criminel de Tizi-Ouzou pour y être jugée ».

En dépit de ces engagements du gouvernement algérien et des constatations du Comité, M. Medjnoune attend toujours d'être jugé. Il n'y a aucun précédent à ce jour en Algérie d'un cas de détention préventive de plus de 10 années. Il s'agit d'une violation particulièrement grave des engagements de l'Algérie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui interdit les détentions arbitraires et considère qu'une personne doit être jugée sans retard excessif.

Force est de constater que la décision de ne pas libérer Malik Medjnoune ou de ne pas le déférer devant une juridiction pour être jugé est une décision politique du gouvernement algérien qui manifestement donne à la justice des instructions non seulement en violation de la loi, mais également contraires aux engagements de l'Algérie résultant de sa ratification des traités internationaux.