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Alkarama for Human Rights, 24 juillet 2008

Alkarama a adressé le 22 juillet 2008 au rapporteur spécial sur la torture une communication concernant M. Bouraoui, ressortissant tunisien, arrêté le 03 mai 2008 à Nouakchott. Maintenu au secret pendant 25 jours, il a été gravement torturé. Il a ensuite été conduit dans une caserne militaire relevant de l'état major de l'armée où il est détenu à ce jour.



M. Abdelkrim Ben Fraj BOURAOUI, né en 1980 en Tunisie, est propriétaire d'un commerce de pièces détachées de véhicules à Nouakchott où il réside régulièrement depuis 2005.

M. BOURAOUI a été arrêté une première fois à Nouakchott par les services de la sûreté de l'Etat (Amn Eddaoula) le 18 janvier 2008 et a été détenu pendant un mois alors que la durée légale de garde à vue, déjà excessive, est de 15 jours.

Présenté devant le procureur de la république du Tribunal de Nouakchott le 18 février 2008, il a été libéré sans avoir fait l'objet de poursuites judiciaires.

Le 03 mai 2008, M. Bouraoui a de nouveau été arrêté par des agents des services de sûreté de l'Etat avec de nombreuses autres personnes, près d'une centaine, dans une opération présentée officiellement par les autorités comme rentrant dans le cadre de la lutte antiterroriste suite à l'attentat perpétré contre l'ambassade d'Israël le 02 février 2008.

Il a été détenu encore une fois au secret pendant 25 jours dans une petite cellule de 1 mètre sur 2 mètres, insalubre et sans ouverture, dans laquelle régnait une chaleur suffocante. Au cours de cette détention, M. Bouraoui a été gravement torturé en particulier lors de ses interrogatoires.

Il a notamment été déshabillé, battu, privé de faire ses besoins naturels ainsi que de sommeil pendant plusieurs jours consécutifs. Il a également été attaché par des menottes derrière le dos et suspendu dans la position du " Jaguar ", méthode de torture employée par les services de sécurité mauritaniens.

Présenté le 28 mai 2008 devant le juge d'instruction de la 3ème chambre du tribunal de 1ère Instance de Nouakchott, ainsi que d'autres personnes arrêtées dans le même cadre, M. Bouraoui présentait des traces évidentes de tortures.

Accusé dans l'affaire de l'attentat contre l'ambassade d'Israël survenu le 02 février 2008, alors qu'à cette date il se trouvait détenu dans les locaux des services de sûreté de l'Etat depuis plus de 15 jours, le juge d'instruction M. Ould Yemeh devant l'inconsistance de l'accusation décida de le placer sous contrôle judiciaire, la plupart des autres personnes ayant été pour leur part libérées.

Sur opposition du parquet, M. Bouraoui n'a pas été libéré et a été alors conduit dans une caserne militaire relevant de l'état major de l'armée où il est détenu à ce jour.

Alkarama craint que M. Bouraoui qui est actuellement emprisonné dans un lieu non prévu à cet effet ne fasse encore l'objet de tortures et/ou de mauvais traitements, raison pour laquelle une intervention urgente est sollicitée afin qu'il soit placé sous la protection de la loi. La Mauritanie est partie à la Convention contre la torture depuis le 17 novembre 2004.

Alkarama avait saisi le 12 juin 2006 le groupe de travail sur la détention arbitraire pour une action urgente à propos de 18 personnes qui dans le cadre d'une vague d'arrestations entre avril et juin 2005 avait touché des personnalités de l'opposition, présidents d'associations, professeurs, avocat, journaliste, tous de divers courants politiques, ainsi que de simples citoyens connus pour avoir exprimé des points de vue critiques à l'égard de la politique du gouvernement. Tous avaient été détenus au secret pendant une période de 20 à 44 jours et soumis à de graves actes de torture et à des traitements particulièrement inhumains et dégradants. Les personnes arrêtées ont été libérées en juin 2007. (voir communiqué ). Le groupe de travail avait conclu qu'il s'agissait de détention arbitraire. (Voir communiqué )

 Comme dans les autres pays arabes, de graves violations des droits de l'homme sont commises en Mauritanie dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Pourtant les élections de novembre 2006 avaient suscité au sein de la population l'espoir que le nouveau gouvernement engagerait une démocratisation de la vie publique et respecterait les droits de l'homme.