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Le 24 novembre 2014, à la veille du second Forum mondial des droits de l'homme qui s'est tenu à Marrakech entre le 27 et 30 novembre 2014 les autorités marocaines ont ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture (OPCAT), donnant ainsi l'espoir de voir le pays s'engager sur la voie d'une réelle mise en œuvre des droits fondamentaux des personnes privées de liberté. Devenant le 76ème État – le quatrième dans le monde arabe après la Tunisie, la Mauritanie et le Liban – à adhérer à cet important instrument du droit international, le Maroc devra mettre en place un mécanisme national de prévention (MNP) contre la torture. Cependant, si l'institution nationale des droits de l'homme marocaine, le Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH), souhaite tenir ce rôle, il lui faudra se mettre rapidement en conformité totale avec les Principes de Paris.

L'entrée en vigueur de ce Protocole optionnel suppose en effet la mise en place, dans le délai d'une année, d'un mécanisme national de prévention (MNP) contre la torture, chargé de visiter tous les lieux de détention du pays sans aucune restriction et d'une manière inopinée. Le Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH) revendique aujourd'hui ce rôle en raison, affirme t-il, de son expérience en matière de visite des lieux de détention.

Cependant une grande partie des défenseurs et des organisations de défense des droits de l'homme appellent à la mise en place d'un mécanisme totalement indépendant du pouvoir exécutif, constitué de personnalités reconnues pour leur engagement, ainsi que d'associations de défense des droits des détenus.

Ainsi, le président de l'Organisation marocaine des droits de l'homme (OMDH) a récemment exprimé son refus que le CNDH soit institué en tant que mécanisme national considérant que « cette institution n'est pas totalement indépendante de l'influence de l'État ».

L'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH), qui a boycotté le Forum de Marrakech pour protester contre « les manœuvres déployées contre les associations et les militants des droits humains » par les autorités, réfute également ce choix et considère que le CNDH reste une institution conservatrice qui agit avec « une grande diplomatie » avec les autorités.

Enfin, le Président de la Ligue marocaine pour la défense des droits humains (LMDDH) s'inscrit dans la même lignée, en rappelant que « le CNDH a été incapable de dévoiler les résultats des enquêtes entreprises sur des cas de torture ayant engendré des décès et n'a pas eu l'audace suffisante pour les porter devant la justice ».

Alkarama rappelle pour sa part que le CNDH est une institution établie par un Dahir royal – une décision souveraine et unilatérale du pouvoir exécutif représenté par la personne du Roi et considérée comme une norme supérieure à la loi votée par le Parlement – et est tenue à ce titre de consulter le Roi avant d'examiner toute question relevant de sa compétence, ou d'enquêter sur des violations graves des droits de l'homme. Ce mode de fonctionnement est en contradiction avec les Principes de Paris concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales des droits de l'homme (INDHs).

Un mécanisme national de prévention a un rôle déterminant à jouer pour lutter efficacement contre la torture et les mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté et doit, à ce titre, jouir d'une marge de manœuvre illimitée et d'une totale indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif. Pour revendiquer ce rôle et être en mesure de le tenir d'une manière efficace, le CNDH marocain devra par conséquent se mettre en totale conformité avec les Principe de Paris.

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