Libye: l'ONU ordonne à la Libye d'enquêter et de poursuivre les graves crimes du passé

Le Comité des droits de l'homme de l'Organisation des Nations unies vient de condamner la Libye à la suite des graves et multiples violations des droits humains commises à l'encontre d'un ressortissant libyen. Les nouvelles autorités libyennes ont maintenant l'obligation de mener une enquête effective et approfondie afin de faire la lumière sur la disparition forcée d'Abdussalam Il Khwildy et les tortures qu'il a subies en détention, de punir les auteurs de ces crimes et d'accorder une indemnisation appropriée. TRIAL et Alkarama, qui ont représenté la victime, appellent la Libye à se conformer à la décision du Comité et à œuvrer à la mise en place d'un véritable Etat de droit dans le pays.

Abdussalam Il Khwildy a été arrêté une première fois en avril 1998 avec son père et ses trois frères. Après la libération du reste des membres de sa famille, Abdussalam Il Khwildy a été maintenu en détention secrète pendant des années sans que sa famille ne soit jamais informée de sa situation. Il a été maltraité et régulièrement soumis à la torture. Il a finalement été libéré en mai 2003 sans jamais avoir été traduit devant un juge ou un tribunal.

Il a de nouveau été arrêté arbitrairement le 17 octobre 2004, maintenu en détention, et, suite à un procès inéquitable mené au mépris des garanties judiciaires les plus élémentaires, a été condamné le 7 août 2006 à deux ans d'emprisonnement par un tribunal spécial. Le 19 octobre 2006, alors qu'Abdussalam devait être libéré, il a disparu dans les méandres du système carcéral libyen. Ses parents sont restés sans nouvelles de lui et ont complètement perdu sa trace. Les autorités libyennes ont démenti qu'il était encore détenu et ont refusé de transmettre toute information autre que celle qu'il avait été libéré.

En mai 2008, la victime a finalement été autorisée à appeler sa famille et à l'informer qu'il était détenu à la prison d'Abou Slim. Abdussalam Il Khwildy est resté en détention jusqu'à sa libération le 22 août 2011, suite au changement de régime intervenu en Libye.

Dans une décision qui vient d'être rendue, le Comité des droits de l'homme a condamné la Libye pour de multiples violations du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l'une des plus importantes conventions des droits de l'homme des Nations unies. Le Comité reconnaît qu'Abdussalam Il Khwildy a été victime à deux reprises de disparition forcée ainsi que de torture et de traitements cruels, inhumains et dégradants. La Libye a également infligé à Khaled Il Khwildy, frère d'Abdussalam, un mauvais traitement inadmissible de par la détresse mentale et l'angoisse qu'il a subies durant de longues années à cause de l'absence totale de nouvelles concernant le destin de son frère.

Le Comité exige de la Libye une enquête effective et approfondie sur la disparition d'Abdussalam Il Khwildy et sur les tortures subies en détention. Le Comité souligne également l'obligation de la Libye de poursuivre, juger et punir les responsables des abus commis et de fournir une indemnisation adéquate aux victimes.

TRIAL et Alkarama, qui ont défendu les victimes devant le Comité des droits de l'homme, expriment leur grande satisfaction à l'issue de la procédure. Pour Philip Grant, directeur de TRIAL, "la Libye doit enfin respecter les règles de l'Etat de droit, et mettre rapidement en œuvre cette décision". Pour Rachid Mesli, directeur juridique d'Alkarama, "il est grand temps que la Libye regarde son passé en face et mette un terme à l'impunité généralisée".

La Libye dispose d'un délai de six mois pour informer le Comité des mesures qu'elle a prises pour mettre en œuvre sa décision. Les deux organisations suivront de près la mise en œuvre de la décision afin de s'assurer que les droits des victimes et leur dignité soient finalement rétablis.

Pour plus d'informations, veuillez contacter:

- Rachid Mesli, Directeur du département juridique d'Alkarama, rachid.mesli@alkarama.org, +41 22 734 10 06

- Philip Grant, Directeur de TRIAL, philip.grant@trial-ch.org, +41 22 321 61 10