Alkarama exprime son inquiétude face à la campagne de répression continue au Koweït depuis la promulgation d'un décret émirien -ayant entraîné la dissolution du parlement et la suspension de certains articles de la constitution courant mai 2024- en violation des engagements internationaux du pays en matière des droits de l'homme et des recommandations des organismes onusiens compétents notamment lors du dernier examen périodique de l’État.
L'émir du Koweït, Mishaal Al-Ahmad Al-Sabah, qui a accédé au pouvoir suite au décès de son prédécesseur Nawaf Al-Ahmad Al-Sabah le 16 décembre 2023, a annoncé, le 10 mai 2024, la dissolution de l'Assemblée nationale et la suspension de certains articles de la constitution pour une période pouvant aller jusqu'à quatre ans.
Une décision qui a suscité de sérieuses préoccupations quant à l'avenir de l'expérience démocratique dans le pays, premier des États du Golfe à avoir adhéré au Pacte international relatif aux droits civils et politiques le 21 mai 1996, ainsi qu'à de nombreuses conventions relatives aux droits de l'homme.
Parallèlement à cette décision, les autorités ont mené des campagnes d'arrestations et de procès inéquitables contre des militants de l'opposition et d’anciens et actuels députés parmi lesquels le candidat parlementaire Messaed Al-Qarifa, les anciens députés Walid Al-Tabtabaei, Hamad Al-Alyan, Abdullah Fahad et les parlementaires actuels, Mohammed Barak Al-Mutair et Anwar Al-Fikr.
Le tribunal pénal koweïtien a prononcé à leur encontre des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu'à quatre ans assortis d’une interdiction de voyager. Toutes ces décisions sont motivées par l’exercice pacifique du droit à la liberté d'expression et de l'opposition aux mesures adoptées par le nouvel émir depuis son accession au pouvoir.
Les jugements rendus se fondent sur certaines dispositions du code pénal de 1960, qui criminalise "l'atteinte à la personne de l'émir" – y compris toute critique à son égard – une législation qui porte atteinte aux droits garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et qui nécessite donc une révision.
Alkarama rappelle encore une fois les engagements du Koweït devant les organismes onusiens compétents en matière de droits de l'homme, notamment les recommandations du Conseil des droits de l'homme, du Comité des droits de l'homme et du Comité contre la torture.
Alkarama ne manquera pas de recourir à toutes actions judiciaires internationales si les autorités poursuivent les campagnes de persécution et d'intimidation à l’encontre des opposants politiques et ne libèrent pas immédiatement les détenus en annulant les jugements inéquitables prononcés.
Alkarama exhorte les familles des victimes et les militants à élever la voix, affirmant sa disposition à déposer des plaintes en leur nom auprès des différents organismes et procédures compétents en matière de droits de l'homme.
Les députés actuels ou les anciennes victimes peuvent également s'adresser au Comité des droits de l'homme de l'Union interparlementaire, et Alkarama se dit prête à assumer ce rôle en leur nom.
Activités d'Alkarama
Alkarama a suivi de près la détérioration de la situation des droits de l'homme au Koweït ces dernières années et a présenté, le 18 juin 2019, au Conseil des droits de l'homme de l'ONU un rapport parallèle dans le cadre du troisième examen périodique universel du Koweït.
Dans son rapport, elle a proposé environ 25 recommandations visant à améliorer le bilan des droits de l'homme du pays, recommandations qui ont été prises en compte par les experts des Nations Unies.
Alkarama a abordé l'importante détérioration des droits de l'homme dans le pays depuis 2014, les restrictions imposées à la liberté d'expression et le recul du droit à la liberté d'expression, notamment après l'introduction par le Koweït en 2015 de la loi sur les crimes électroniques, utilisée pour réprimer les militants des droits de l'homme, les journalistes ou les opposants pacifiques ainsi que le recours croissant à la déchéance de la nationalité koweïtienne. Alkarama a documenté 33 cas de ce type au cours des dernières années, y compris celui de l'académicien koweïtien Hakim Al-Mutairi.
Alkarama a également formulé des recommandations importantes dans le cadre de son rapport parallèle soumis au Comité contre la torture, dans lequel elle a appelé le Comité à exhorté les autorités du pays à respecter leurs engagements en vertu de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Dans le même contexte, Alkarama a apporté une contribution importante à travers le rapport parallèle soumis au Comité des droits de l'homme de l'ONU -chargé de surveiller la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques- dans le cadre du troisième examen périodique de l'État partie.
Alkarama poursuit ses activités dans ce domaine afin que la détérioration des droits de l'homme au Koweït cesse et recommande aux autorités de réviser leurs politiques susceptibles d'aggraver la tension interne et de nuire à l'image du pays à l'étranger.
Alkarama souligne la nécessité de libérer tous les députés, d'annuler les jugements rendus à leur encontre et de s'engager dans un processus de réconciliation globale axé sur les droits de l'homme.