Égypte : Alkarama soumet sa contribution à la liste de questions au Comité contre la torture de l’ONU en vue du prochain examen

Egypte LOI

Alkarama a récemment soumis une liste de 22 questions au Comité contre la torture de l’ONU pour que les experts onusiens les soulèvent auprès des autorités égyptiennes en vue du prochain examen du sixième rapport périodique de l’Égypte.

Composé de dix experts indépendants, le Comité contre la torture de l’ONU est chargé de surveiller l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par ses États parties.

La liste des questions, préparée dans le cadre de la contribution des organisations non gouvernementales à l’examen, vise à faciliter la préparation d'un dialogue constructif avec l'État partie.

A travers sa liste de questions, Alkarama a attiré l’attention du Comité sur la dégradation de la situation des droits de l'homme en Égypte depuis son dernier examen en 2002 et exprimé ses principales préoccupations.

Restrictions croissantes des droits humains et des libertés fondamentales

La situation des droits de l’homme en Égypte, qui était déjà une source de grande préoccupation depuis son dernier examen périodique par le Comité contre la torture (CAT) en 2002, s’est encore détériorée au fil des ans et en particulier depuis le coup d’état militaire du général Abdel Fattah al-Sissi le 3 juillet 2013.

Dans sa liste de questions, Alkarama a noté qu’en dépit des affirmations d’al-Sissi concernant la volonté du pays de mettre fin aux pratiques passées et de construire un État de droit, les violations des droits humains n’ont fait qu’augmenter et sont devenues plus systématiques.

De nombreuses lois restrictives des libertés fondamentales ont été promulguées et l’Égypte n’a cessé de s’attaquer aux libertés fondamentales, générant une grave situation des droits humains mise en évidence par les ONG internationales et divers mécanismes des droits humains des Nations Unies (ONU).

Ainsi, Alkarama a invité le Comité à questionner l’Etat partie au sujet des textes législatifs qui ouvrent la voie à des restrictions et des violations de droits fondamentaux dont, entre autres, la loi n°107 de 2013 relative à l’"Organisation du droit de réunion publique, de cortèges et de manifestations pacifiques dans les lieux publics".

L’impunité flagrante des autorités égyptiennes

Au fil des années, Alkarama a continué à recevoir et à documenter à l’attention des mécanismes de l’ONU de nombreux cas de torture, de mauvais traitements, de détentions secrètes, de disparitions forcées et autres abus et violations systématiques des droits fondamentaux et en particulier du droit à la vie, du droit à un procès équitable, du droit à la liberté d’expression et du  droit à la liberté de réunion pacifique.

Ces exactions, qui contrastent avec les engagements renouvelés des autorités en faveur de la protection et de la promotion des droits humains, ont été perpétrées par les diverses composantes de l’appareil sécuritaire égyptien.

Les autorités égyptiennes ont ainsi continué de violer leurs obligations internationales et d’instaurer un climat d’impunité généralisé pour les auteurs de graves violations, en particulier en ce qui concerne la torture qui reste largement et systématiquement utilisée contre toutes les personnes soupçonnées de crimes terroristes présumés, mais aussi contre des opposants politiques pacifiques, des femmes et des enfants. Aujourd’hui, la répression s’étend à tous les individus qui s’opposent à la politique du gouvernement.

Alkarama a appelé le Comité à s’enquérir au sujet de la torture pendant les détentions au secret ou encore les périodes de disparitions forcées, suggérant également aux experts onusiens de questionner l’Etat partie s’il veille à ce que toutes les allégations de torture fassent l'objet d'une enquête rapide, impartiale et indépendante, et à ce que tous les auteurs soient traduits en justice.

Alkarama a par ailleurs appelé le Comité à s’enquérir au sujet du manque d’indépendance du ministère public par rapport à l'exécutif puisqu’il s’agit de l’une des causes de l'impunité qui prévaut dans le pays. Alkarama a suggéré au Comité de demander à l’Égypte s’il entend adopter des mesures pour garantir l’indépendance du ministère public et de créer un mécanisme indépendant chargé de recevoir les plaintes pour torture afin que des enquêtes approfondies et transparentes soient menées.

Les violations graves et systématiques des droits et libertés fondamentaux constituent une réalité que l’Égypte s’efforce encore de justifier sous prétexte de « lutte contre le terrorisme ». Les violations massives des droits humains ont été justifiées par l’objectif de l’État d’éradiquer le terrorisme. L’Égypte mène sa politique répressive par tous les moyens et sans tenir compte du droit international relatif aux droits de l’homme. En muselant totalement sa société civile, elle refuse aux citoyens la possibilité de contester pacifiquement cette politique.

Alkarama a encouragé le Comité à s’enquérir au sujet de la loi antiterroriste afin de savoir si l’Égypte envisage de modifier la définition de la notion de « terrorisme » afin de la mettre en conformité avec les normes internationales relatives aux droits de l'homme.

L’Égypte doit fournir par écrit ses réponses à la liste des questions qui sera adoptée par le Comité contre la torture en vue du prochain examen.