EAU : Les autorités doivent abandonner les poursuites contre le défenseur des droits de l'homme Waleed Al-Shehhi

 Waleed Al-Shehhi
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Après Abdulhamid Al-Hadidi, Waleed Al-Shehhi est le deuxième défenseur des droits de l'homme à avoir été arrêté pour avoir diffusé des informations sur les audiences du procès des « 94 des Emirats » à travers les réseaux sociaux. Alkarama demande aux autorités émiraties d'abandonner les poursuites engagées contre lui en vertu de la nouvelle loi relative à la lutte contre la cybercriminalité n° 5/2012 et de le libérer immédiatement.

Le 11 mai dernier, Waleed Al-Shehhi a été arrêté par des agents des services de sécurité émiratis à Ajman sans que ceux-ci ne l'informent des accusations portées à son encontre.

Il semble toutefois que son activisme sur les réseaux sociaux soit à l'origine de cette arrestation. En effet, depuis le début du procès des 94 militants connus sous le nom des « 94 des Emirats » devant le Tribunal suprême fédéral d'Abou Dhabi, il a joué un rôle clé dans la diffusion d'informations sur les audiences et a dénoncé publiquement les irrégularités du procès.

Le jour de son arrestation, Waleed Al-Shehhi a immédiatement été emmené vers un lieu inconnu, probablement un centre de détention contrôlé par les services de sécurité à Abou Dhabi, où la torture et les mauvais traitements sont une pratique courante.

Dix jours plus tard, il a été transféré à la prison centrale d'Al-Wathba, à Abou Dhabi. Il est actuellement accusé d'avoir incité les utilisateurs de Twitter à critiquer les services de sécurité de l'Etat, en vertu des articles 28 et 29 de la nouvelle loi sur la lutte contre cybercriminalité n°5/2012. Cette législation a fait l'objet de nombreuses recommandations appelant à sa modification ou sa suppression au cours du second Examen Périodique Universel (EPU) des Emirats arabes unis en janvier 2013.

Les articles 28 et 29 de cette loi font référence à des crimes de nature à porter atteinte à la « sécurité nationale ». Si Al-Shehhi est accusé en vertu de ces disposition, il risque une peine de 15 ans de prison sans possibilité d'appel à la condamnation, en contradiction avec le droit international.

La formulation vague et imprécise de ces articles ouvre la voie à de nombreuses interprétations possibles et à un champ d'application très large pour des crimes de différentes natures qui peut donner lieu à des violations du droit international.

Les articles 28 et 29 de la loi relative à la lutte contre la cyber-criminalité No.5/2012 punissent des crimes qui mettent « en danger l'unité nationale et les plus hauts intérêts de l'Etat » ou « mettent en péril l'ordre public », ou « portent atteinte à la réputation, au prestige et à la stature de l'Etat ou à quelconque de ses institutions ou de son président, vice-président ou des dirigeants des Emirats, à leur prince hériter (...) à son hymne national, ou à ses symboles ». Documenter des audiences « publiques » ne met en aucun cas « en danger l'unité nationale », ni ne « porte atteinte aux intérêts et symboles de l'Etat ».

L'arrestation de Waleed Al-Shehhi n'est qu'un un exemple de plus de la vague de répression qui touchent de nombreux militants qui ne font qu'exercer leurs droits garantis par la constitution et la législation émiraties, en particulier la liberté d'expression. En outre, cela constitue également une violation des obligations des Emirats arabes unis en vertu du droit international. Le droit à la liberté d'opinion et d'expression est garanti par l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui stipule : « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit. »

Hier, Alkarama a soumis un appel urgent au Rapporteur spécial sur la liberté d'expression de l'ONU et a sollicité son intervention auprès des autorités émiraties afin que M. Al Shehhi soit libéré immédiatement et que toutes les accusations portées à son encontre soient levées.