Djibouti: Arrestation et détention du journaliste indépendant Mohamed Ibrahim Waïss

Mohamed Ibrahim Waïss

Le 11 janvier 2016, la gendarmerie a arrêté Mohamed Ibrahim Waïss, un journaliste indépendant de 41 ans travaillant pour la Voix de Djibouti. Régulièrement harcelé par les autorités du fait de ses prises de position, il est depuis détenu sans avoir été autorisé à voir sa famille ou son avocat, tandis que les accusations portées contre lui demeurent indéterminées. Compte tenu des risques de mauvais traitements et de condamnation à une peine de prison qu'il encourt, Alkarama a sollicité le 14 janvier le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression (RS LIBX) afin qu'il demande aux autorités djiboutiennes de le libérer.

En 2014 déjà, Alkarama avait alerté le RS LIBX du cas de Mohamed, qui avait été arrêté le 8 août alors qu'il couvrait une manifestation pacifique. Maltraité en détention, il avait été inculpé de « participation à une manifestation illégale » avant d'être l'objet d'une décision de relaxe de la part du tribunal correctionnel de Djibouti-ville et libéré le 22 août 2014.

Cette arrestation n'était à l'époque pas la première pour Mohamed, qui du fait de son affiliation politique à la coalition de l'opposition − l'Union pour le Salut National (USN), un groupe régulièrement ciblé par les autorités − et de son travail de journaliste indépendant, a souvent fait l'objet de harcèlements et d'intimidation de la part des autorités. Ainsi, quand le matin du 11 janvier 2016 son véhicule a été stoppé par la gendarmerie alors qu'il circulait dans Djibouti-ville, l'histoire a semblé se répéter, favorisé par un contexte politique particulièrement tendu, notamment à la suite de violents affrontements entre les forces de sécurité et la population ayant entraîné la mort de dizaines de personnes fin décembre 2015.

Sommé de sortir de sa voiture, il a alors été arrêté sans raison apparente et emmené à la Section de recherches et de documentation (SRD) de la gendarmerie, où il n'a pas été autorisé à prévenir son avocat ni sa famille de son arrestation. Lorsque ces derniers l'ont apprise par des témoins, ils ont voulu lui rendre visite à la SRD pour en savoir plus sur les raisons de sa détention et son état de santé, mais les gendarmes leur ont refusé l'accès. Son avocat, Me Zakaria Abdillahi Ali, a également été interdit de visite et n'a donc pas pu assister Mohamed au cours de sa garde-à-vue, en violation de l'article 14.3b du Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP) ratifié par Djibouti en 2002.

Finalement, Mohamed a été présenté le 13 janvier au procureur et placé sous mandat de dépôt, toujours sans pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat. Il a depuis été transféré à la prison de Gabode où il n'a toujours pas pu recevoir de visite de sa famille et alors que l'on ne sait toujours pas ce que lui reprochent les autorités. « Lorsque vous êtes un journaliste indépendant à Djibouti, vous êtes condamné à être arrêté à tout moment par les autorités, sans raison, puis détenu sans avoir droit à un avocat, un médecin et sans que votre famille ne puisse vous voir. On vous prive de tous vos droits fondamentaux, » a déclaré Maydane Okiye, un journaliste djiboutien lui aussi régulièrement visé par les autorités.

Afin de faire cesser sa détention arbitraire, Alkarama a sollicité en urgence le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression (RS LIBX) afin qu'il appelle les autorités djiboutiennes à libérer Mohamed Ibrahim Waïss. Les autorités doivent garantir que toute personne puisse librement exprimer ses opinions à Djibouti sans être à risque d'être intimidé ou arrêté et libérer toutes les personnes détenues en raison de leurs affiliations politiques.

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