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Dans un nouvel effort pour exiger la redevabilité et le respect des droits de l'homme en Arabie Saoudite, Alkarama a soumis le 23 juillet 2025 une nouvelle communication aux procédures spéciales de l'ONU et à la FIFA concernant l'attribution de la Coupe du Monde de la FIFA 2034 au Royaume.

Ce document décrit en détail les graves failles juridiques et procédurales qui ont miné l'intégrité du processus d'appel d'offres et permis à l'Arabie Saoudite de se voir attribuer l'organisation de la Coupe du Monde de la FIFA 2034 et ce, malgré les préoccupations crédibles et durables en matière de droits de l'homme soulevées par les acteurs de la société civile et les experts internationaux. Cette nouvelle communication s'appuie sur deux soumissions antérieures faites au Groupe de travail des Nations unies sur les entreprises et les droits de l'homme (GTEDH) et à d'autres procédures spéciales en octobre et décembre 2024, peu après la confirmation par la FIFA de l'Arabie saoudite, seul pays hôte candidat au vote, par un scrutin accéléré et opaque tenu le 11 décembre 2024.

Pour la première fois, la communication a également été soumise directement à la FIFA par le biais de son Portail de signalement en matière de droits de l'homme. Il s'agit d'un test crucial quant à l'engagement de la FIFA à respecter les droits de l'homme et à sa volonté de répondre aux risques largement documentés relatifs à la candidature pour la Coupe du monde de 2034.

 

  1. Vices procéduraux dans l'attribution de la Coupe du monde 2034

La confirmation de l'Arabie saoudite comme hôte de la Coupe du monde de la FIFA 2034 a suivi une procédure d'appel d'offres inhabituellement accélérée et opaque, qui s'est écartée des pratiques antérieures et des attentes en matière de transparence. En octobre 2023, la FIFA a annoncé un calendrier accéléré et a regroupé les candidatures pour 2030 et 2034 en un seul processus décisionnel. Ainsi, les associations membres ont été privées de toute possibilité de délibérer sur les mérites et les risques de chaque candidature séparément.

L'Arabie saoudite est devenue le seul candidat pour le tournoi de 2034 dans les jours qui ont suivi l'annonce de la candidature, après que d'autres candidats potentiels se soient retirés ou aient été disqualifiés en raison de restrictions géographiques. La FIFA a ensuite procédé au vote par acclamation lors d'une session virtuelle, sans ouvrir de débat préalable ni présenter une évaluation complète de la situation des droits de l'homme aux associations membres. Cette approche restreinte et prédéterminée n'a pas été accompagnée de garanties procédurales ni d'un engagement significatif de la part de tous les acteurs concernés, ce qui a finalement nui au respect des engagements pris par la FIFA en matière de diligence raisonnable dans le domaine des droits de l'homme.

De plus, le rôle joué par le cabinet d'avocats AS&H Clifford Chance, mandaté par les autorités saoudiennes pour établir l’évaluation le contexte des droits humains dans le cadre de la candidature, soulève de graves inquiétudes. De nombreuses ONG et experts indépendants ont d'ailleurs dénoncé cette évaluation, qu'ils jugent biaisée et manquant d'indépendance, et la décrivent comme un blanchiment des abus documentés. En effet, le champ de l'évaluation a été restreint, excluant des questions cruciales telles que la liberté d'expression, la répression des défenseurs des droits humains et l'utilisation abusive de la législation antiterroriste. De plus, sa dépendance à des sources contrôlées par l'État compromet son objectivité.

En effet, le cabinet n'a pas consulté la société civile indépendante, les syndicats ou les communautés affectées, et a achevé son évaluation en un délai déraisonnablement court de six semaines. Au lieu de mener une véritable analyse, le rapport a servi à donner une apparence de légitimité à la décision de la FIFA, malgré des vices de procédure évidents. L'approbation de ce rapport controversé par la FIFA soulève de sérieuses inquiétudes quant à ses obligations de diligence raisonnable et à sa responsabilité institutionnelle.

Enfin, le processus de vote lui-même manquait de transparence. En décembre 2024, les membres ont été invités à approuver les candidatures par acclamation, sans débat ni discussion, lors d'une réunion par visioconférence. La FIFA n'a pas non plus fourni de justification claire pour regrouper les votes de 2030 et de 2034, ni expliqué en quoi cette approche était conforme à ses obligations en vertu des normes internationales relatives aux droits humains.

 

  1. Risques pour les droits humains associés à la candidature saoudienne

Alkarama a souligné que les risques pour les droits humains devaient être compris dans le contexte de l'utilisation continue par l'Arabie saoudite d'une législation antiterroriste vague pour réduire au silence la dissidence pacifique - en ciblant particulièrement les défenseurs des droits de l'homme, les minorités et les activistes en ligne - à travers un schéma de violations comprenant notamment la détention arbitraire, la disparition forcée et la torture.

Par exemple, la candidature saoudienne comprend des projets à grande échelle tels que NEOM, une mégapole futuriste qui a suscité une condamnation mondiale en raison d'informations faisant état d'expulsions forcées, de répression judiciaire et de violences à l'encontre de membres de la tribu autochtone des Howeitat. Ces actions ont été dénoncées par les procédures spéciales des Nations unies comme des violations flagrantes de la législation internationale en matière de droits de l'homme. 

Les travailleurs migrants restent également exposés à de graves risques. En mars 2025, le premier décès d'un travailleur migrant lié à un chantier de construction de la Coupe du monde 2034 a mis en évidence les conséquences concrètes de l'attribution de méga-événements sportifs à des pays qui ne respectent pas les normes internationales en matière de travail et de droits de l'homme.

Dans l'ensemble, ces conditions réaffirment la classification de l'Arabie saoudite en tant qu'environnement à haut risque pour les violations des droits de l'homme, et font craindre que l'organisation de la Coupe du monde dans ce pays ne contribue activement à d'autres abus.

 

  1. Risques pour les droits humains associés à la candidature saoudienne

Alkarama a souligné que les risques pour les droits humains devaient être compris dans le contexte de l'utilisation continue par l'Arabie saoudite d'une législation antiterroriste vague pour réduire au silence la dissidence pacifique – en particulier contre les défenseurs des droits humains, les minorités et les militants en ligne – par le biais d'un ensemble de violations qui comprennent notamment la détention arbitraire, les disparitions forcées et la torture.

Par exemple, la candidature saoudienne comprend des projets à grande échelle tels que NEOM, une mégapole futuriste qui a suscité une condamnation mondiale en raison d'informations faisant état d'expulsions forcées, de répression et de violence contre les membres de la tribu Howeitat. Ces actions ont été dénoncées par les procédures spéciales de l'ONU comme des violations flagrantes du droit international des droits humains.

Les travailleurs migrants restent également exposés à de graves risques. En mars 2025, le premier décès de travailleur migrant lié à un chantier de construction de la Coupe du monde de 2034 a souligné les conséquences réelles de l'attribution de méga-événements sportifs à des pays qui ne respectent pas les normes internationales en matière de droits du travail et de droits humains.

Prises ensemble, ces conditions réaffirment la classification de l'Arabie saoudite comme un environnement à haut risque pour les violations des droits humains, ce qui soulève l'inquiétude quant au fait que l'organisation de la Coupe du monde dans ce pays pourrait contribuer activement à de nouvelles violations. 

Alkarama a souligné dans sa dernière soumission que depuis la communication initiale d'octobre 2024, les mécanismes des droits de l'homme des Nations Unies et la société civile ont continué à documenter des violations systémiques des droits de l'homme en Arabie Saoudite. Celles-ci incluent

  • La détention arbitraire et la disparition forcée, ciblant souvent les défenseurs des droits de l'homme et d'autres activistes pacifiques pour avoir simplement exprimé une opinion dissidente en ligne,

  • L’usage Torture et mauvais traitements en détention : dont l’isolement prolongé, la détention au secret, et les sévices graves infligés par les forces de sécurité ainsi que le refus de soins médicaux,

  • Les représailles contre les défenseurs des droits de l'homme, poursuivis en vertu de lois antiterroristes vagues et privés des garanties d'un procès équitable,

  • Le maintien de la peine de mort, y compris pour des actes qui n'atteignent pas le seuil des « crimes les plus graves » au regard du droit international, notamment dans les cas impliquant des mineurs ou des accusations liées à des manifestations.

 

  1. Violations des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme

Le rapport d'Alkarama conclut que la décision de la FIFA d'attribuer la Coupe du monde 2034 à l'Arabie saoudite constitue une violation directe de sa propre politique en matière de droits de l'homme et de ses responsabilités en vertu des Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme (UNGP), une norme mondiale approuvée par les Nations unies et la FIFA elle même pour guider les entreprises et les organisations dans la prévention, la prise en compte et la réparation des violations des droits de l'homme liées à leurs activités. Concrètement :

  • Le principe 13 a été violé parce que la FIFA n'a pas empêché ou atténué les effets négatifs sur les droits de l'homme qu'elle savait ou aurait dû savoir être liés à la candidature saoudienne, y compris les risques pour la liberté d'expression, de réunion, et les droits des défenseurs, des femmes, des travailleurs migrants et des minorités.

  • Les principes 17 et 18 ont été violés en raison de l'absence de tout processus crédible de diligence raisonnable en matière de droits de l'homme, y compris l'absence de consultation transparente des parties prenantes ou d'évaluation sérieuse des risques, et ce malgré les avertissements préalables des organes de l'ONU et de la société civile.

  • Les principes 23 et 24 exigent une vigilance accrue dans les environnements à haut risque, et pourtant la FIFA a procédé sans garanties suffisantes, sans mécanismes de contrôle ni engagements contraignants de la part de l'Arabie saoudite, ignorant de fait la nature systémique et continue des violations des droits de l'homme dans le pays.

 

5. Demandes soumises aux procédures spéciales de l'ONU et à la FIFA

Dans ses conclusions et demandes, Alkarama a appelé les procédures spéciales de l'ONU - en particulier le groupe de travail de l'ONU sur les entreprises et les droits de l'homme - à suivre de près le traitement de cette communication par la FIFA. Elle les exhorte à évaluer si la FIFA respecte ses responsabilités en vertu des normes internationales en matière de droits de l'homme et des Principes directeurs de l'ONU.

Parallèlement, l'association demande à la FIFA de prendre des mesures immédiates et concrètes pour remédier aux manquements identifiés. Plus précisément, la FIFA devrait annuler la confirmation de l'Arabie saoudite comme hôte de la Coupe du monde 2034 et relancer le processus d'appel d'offres sur la base d'un nouveau modèle. Cela devrait inclure une évaluation des droits de l'homme véritablement indépendante et complète couvrant les droits du travail, la liberté d'expression et la protection des défenseurs des droits de l'homme ; l'établissement de critères mesurables et applicables en matière de droits de l'homme pour les pays hôtes ; et l'obligation pour l'Arabie saoudite de fournir des engagements contraignants pour réformer les lois et les pratiques qui violent actuellement les normes internationales. 

Alkarama a souligné que la FIFA devrait commanditer une nouvelle évaluation des droits de l'homme, véritablement indépendante et transparente, qui inclurait toutes les préoccupations pertinentes en matière de droits - telles que la protection du travail, la liberté d'expression et les garanties pour les groupes vulnérables - et qui consulterait la société civile indépendante et les communautés affectées.

En outre, la FIFA doit exiger de l'Arabie saoudite qu'elle adopte des engagements contraignants en faveur des libertés fondamentales, notamment en réformant les lois répressives, en ratifiant les principaux traités internationaux, en coopérant avec les mécanismes des Nations unies et en permettant le travail de la société civile et des médias indépendants. Enfin, des mécanismes de contrôle solides doivent être mis en œuvre pour garantir le respect de ces engagements tout au long du processus.

Conclusion et appel à l'action

Cette nouvelle plainte marque la première fois qu'Alkarama soumet ses préoccupations par le biais du mécanisme de plainte de la FIFA en matière de droits de l'homme. L'association a également informé officiellement les procédures spéciales de l'ONU et la FIFA de ce double dépôt, soulignant que la réponse - ou l'absence de réponse - de la FIFA servira de test critique pour déterminer si son mécanisme de réclamation offre un véritable accès à la réparation et à la responsabilité institutionnelle.

Parallèlement, Alkarama appelle à une plus grande responsabilisation publique : les organisations de la société civile, les supporters de football, les défenseurs des droits des travailleurs et les autres personnes concernées sont invités à déposer des plaintes sur Portail de signalement de la FIFA. Ce mécanisme, présenté par l’organisation comme outil de remédiation, doit être testé et rendu redevable. Seule une pression collective permettra de remettre en question et contrecarrer la normalisation des pratiques répressives dans des pays tels que l'Arabie saoudite à travers des événements sportifs mondiaux.