Maroc: Détention de M. Etefia, époux de Mme Aboutabit

M. Khalid Etefia, domicilié en France, a été arrêté par les autorités marocaines le 8 février 2010 à son arrivée au Maroc où il s'était rendu pour rendre visite à son épouse, Mme Doha Aboutabit, détenue depuis le 3 décembre 2009 (voir communiqué). Tous deux sont détenus à la prison de Salé.

Alkarama a adressé le 3 mai 2010 une communication au Rapporteur spécial sur la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, lui demandant d'intervenir auprès des autorités marocaines en raison des graves violations de leurs droits fondamentaux subies par M. Etefia et son épouse Mme Aboutabit au prétexte de la lutte contre le terrorisme.

M. Khalid ETEFIA, franco-marocain de 34 ans, chercheur en biologie à l’Université Pierre et Marie Curie (Paris VI) à Paris où il demeure, s'est rendu au Maroc en raison de l'incarcération de Mme Aboutabit, son épouse, accusée d’avoir « financé le terrorisme ».

Dès son arrivée sur le territoire marocain le 08 février 2010 , M. Etefia a été arrêté à trois heures du matin dans sa chambre d’hôtel à Rabat. Il a été déféré le jour même devant le juge d’instruction de la Cour d’appel de Rabat et placé en détention lui aussi à la prison de Salé. A ce jour, il n'a toujours pas été permis aux époux de se voir.

Il a été reproché à M. Etefia d’avoir un compte bancaire commun avec son épouse, compte à partir duquel cette dernière avait envoyé une modique somme d’argent à son frère et à sa demande, ignorant totalement l’usage que celui-ci comptait faire de cette somme. Mme Aboutabit est quant à elle accusée pour cette raison d’avoir « financé le terrorisme ». Son frère se serait par la suite rendu en Irak où, selon les autorités, il aurait ultérieurement trouvé la mort en 2008.

Depuis l’adoption de la Résolution 1373 par le Conseil de sécurité le 28 septembre 2001, de nombreux pays, dont le Maroc, ont pris d’une manière précipitée des mesures législatives, voire institué certaines pratiques dans le sens d’un durcissement des dispositifs répressifs déjà en vigueur au prétexte de s’acquitter de l’obligation qui leur incombe de combattre le terrorisme. Cette situation a entraîné de graves conséquences sur les libertés individuelles et les droits fondamentaux des citoyens.

A ce titre, les autorités marocaines ont promulgué la loi N°03-03 relative à la lutte contre le terrorisme entrée en vigueur le 05 juin 2003 et intégrée dans le nouveau Code de procédure pénale au lendemain des attentats du 16 mai 2003. 

Cette nouvelle législation réduit d’une manière importante les standards internationaux relatifs à la protection des droits de l’homme et en particulier relativement aux personnes suspectées de terrorisme en élargissant le champ d’action des services de sécurité et des autorités judiciaires.

Les conditions de détention de Mme Aboutabit lors de sa garde à vue de 12 jours, sans contact avec le monde extérieur et en subissant de graves tortures psychologiques montrent clairement les abus commis par les autorités au prétexte de la lutte contre le terrorisme.

La pratique des services de sécurité démontre également qu’ils passent outre les dispositions mêmes de la loi antiterroriste en ignorant les garanties minimales prévues comme la communication avec un avocat à partir d’un certain délai.

La Résolution 64/168 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée le 18 décembre 2009 rappelle explicitement que les Etats doivent veiller à ce qu’aucune forme de privation de liberté ne soustraie la personne détenue à la protection de la loi et à respecter les garanties relatives à la liberté, à la sûreté  et à la dignité de la personne conformément  au droit international.