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Jordanie : La nouvelle loi anti-terroriste n'est pas conforme aux standards internationaux des droits de l'homme

Alkarama exprime son inquiétude au sujet de la nouvelle loi anti-terroriste adoptée par le gouvernement jordanien le 1er Juin 2014. Les modifications apportées à la loi originelle n°55 de 2006 ne sont pas conformes aux standards du droit international des droits de l'homme et aux conventions ratifiées par le Royaume Hachémite.

L'une des principales sources d'inquiétude concerne la définition particulièrement extensive du terrorisme adoptée par le gouvernement. La nouvelle loi criminalise en effet des faits sans rapport avec des actions de violence comme la « perturbation de l'ordre public », «l'atteinte à l'environnement « ou encore à « l'économie ». Les amendements introduits permettent d'inclure dans la définition des actes de terrorisme des crimes et délits de droit commun, quelque soit leur degré de gravité, déjà incriminés par le code pénal.

Le fait de critiquer ou de caricaturer un dirigeant étranger, ou plus largement la politique d'un pays tiers, est également inclus dans cette définition; ainsi, toute personne ayant « perturbé les relations avec un pays tiers » est passible de poursuites. A l'instar des législations les plus liberticides des pays de la région, la Jordanie incrimine également aujourd'hui les activités liées aux associations et organisations caritatives et de bienfaisance. La liberté d'information et de la presse est également mise à mal ; les médias pourront à l'avenir être poursuivis pour la « promotion d'idées [terroristes] » s'ils venaient à traiter et à publier des informations liées à des actions terroristes. Ces nouvelles dispositions pourraient affecter durement le libre exercice du droit à la liberté d'association et de réunion ainsi que la liberté d'expression.

Plus grave encore, la qualification d'acte terroriste permet aux autorités de déférer les auteurs des infractions réelles ou supposées devant une juridiction d'exception, la Cour de sureté de l'Etat. Cette juridiction, présidée par un militaire et dont les membres sont nommés par le premier Ministre, ne présente aucune garantie d'indépendance. Ce dernier est d'ailleurs en charge d'approuver ses décisions et de les moduler à sa discrétion -en parfaite violation des règles internationales relatives au procès équitable.

Si la communauté internationale reconnait la nécessité pour les Etats de disposer d'un arsenal juridique fort pour lutter contre le terrorisme, cela ne doit pas être une justification pour violer les droits et libertés les plus fondamentales des citoyens. La nouvelle loi jordanienne semble malheureusement avoir été adoptée uniquement pour permettre au gouvernement de disposer d'une législation pour criminaliser et réprimer toute opposition politique sous le prétexte de lutter contre le terrorisme.

Alkarama a saisi aujourd'hui le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste des Nations Unies pour l'informer de cette nouvelle situation et exprimer ses préoccupations. Alkarama rappelle aux autorités jordaniennes qu'elles sont tenues de garantir les droits fondamentaux de ses citoyens et de respecter leur obligations internationales, y compris dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.