La guerre des drones au Yémen : Un premier rapport présenté à l'ONU

Mohammed Al-Ahmady, Alkarama's representative in Yemen

Alkarama et Hood ont soumis à deux experts de l'ONU un rapport factuel sur dix frappes aériennes américaines au Yémen commises entre 2009 et 2013.

Le 24 janvier dernier, le Rapporteur spécial sur la protection des droits de l'homme dans la lutte antiterroriste, Ben Emmerson, a lancé une enquête sur les tirs de drones et autres formes de frappes ciblées au Pakistan, au Yémen, en Somalie, en Afghanistan et dans les Territoires palestiniens occupés, qui ont provoqué un nombre disproportionné de victimes civiles. L'objectif de cette enquête, menée par une équipe de dix experts de l'ONU dont Christof Heyns, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, est de déterminer s'il y a des "soupçons sérieux d'exécutions extrajudiciaires". Les résultats seront présentés à la prochaine session de l'Assemblée générale des Nations unies en octobre 2013.

Alkarama et HOOD ont soumis à Ben Emmerson et à Christof Heyns un rapport factuel contenant des informations détaillées sur dix attaques ciblées commis par les forces aériennes américaines au Yémen entre le 17 décembre 2009 et le 17 avril 2013 dans six différentes provinces. Ce premier rapport s'inscrit dans le cadre d'un projet visant à documenter ces exécutions extrajudiciaires et à appeler les autorités américaines et yéménites à ordonner l'ouverture d'enquêtes indépendantes, d'établir la responsabilité et de juger les responsables.

Depuis la première frappe aérienne en novembre 2002 jusqu'au mois de mai 2013, il y aurait eu entre 134 et 226 opérations militaires américaines au Yémen comprenant des frappes par avions, par drones ou l'envoi de missiles de navires de guerre stationnés dans le golfe d'Aden. Le nombre de morts dues à ces assassinats ciblés est estimé à près de 1150 entre 2002 et avril 2013.

Le 23 mai dernier, le président américain Barack Obama rappelait l'objectif des « assassinats ciblés » par frappes aériennes : non pas celui de « punir des individus » mais d' « agir contre des terroristes qui représentent une menace continue et imminente pour le peuple américain ».

Néanmoins, non seulement la définition de « terroriste » et de « combattant » reste problématique mais aussi ces « cibles de haut niveau » ne représenteraient que 2% des victimes décédées suite à ces frappes aériennes « ciblées ». Quant à ces « terroristes », les charges retenues contre eux restent inconnues. Obama a en outre déclaré que la mort de civils constitue une « risque inhérent à toutes les guerres ».

« Les Etats-Unis ne s'engagent dans des frappes que lorsqu'il leur est impossible de capturer des terroristes. Interroger les suspects, les mettre en détention et les poursuivre en justice restent toujours des options que nous privilégions. », a rapporté Obama. Cette déclaration semble pourtant tout à fait contredire la pratique sur le terrain qui démontre que la capture des « cibles » aurait été possible dans la plupart des cas.

En dépit de la volonté affichée du président américain d'être plus transparent sur la stratégie de lutte antiterroriste des Etats Unis, ni les bases juridiques de ces frappes aériennes américaines, ni les chaînes de commandement n'ont été à ce jour établies.

Les 10 attaques aériennes américaines au Yémen documentées dans notre rapport :

- Al-Maajala (Abyan), 17 décembre 2009
- Jaber Al-Shabwani (Marib), 24 mai 2010
- Azzan (Shabwa), 30 mars 2012
- Ja'ar (Abyan), 15 mai 2012
- Khashamir (Hadramout), 29 août 2012
- Radaa (Al-Baydha), 2 septembre 2012
- Al-Shihr (Hadramout), 24 décembre 2012
- Al-Shihr (Hadramout), 28 décembre 2012
- Khawlan (Sanaa), 23 janvier 2013
- Wusab, 17 avril 2013

Pour plus d'informations, veuillez contacter :
- Karim Sayad, Responsable juridique de la région du Golfe, Fondation Alkarama, karim@alkarama.org +41 22 734 10 06 (français, anglais, arabe)

- Mohamed Al-Ahmady, Représentant d'Alkarama au Yémen, ahmady@alkarama.org, +967 777 56 75 74 (arabe)